A la mort de son grand-père il y a près de 30 ans, cet Emirati de 45 ans dit s'être senti "socialement, culturellement et historiquement" responsable du maintien de cette tradition.
"J'ai vécu et j'ai grandi avec mon grand-père", raconte à l'AFP Abdallah Souwaidi, vêtu de la traditionnelle robe blanche émiratie. "Il m'a beaucoup appris sur la pêche des perles, d'autant que je ne cessais pas de lui poser des questions".
Délaissant la vieille technique qui consistait à arracher les perles aux huîtres au fond de la mer, lors de plongées sans équipement moderne, il a choisi de les cultiver, selon une méthode mise au point par des Japonais.
Celle-ci consiste à insérer un corps étranger dans l'huître, qui produit ensuite de la nacre pour s'en protéger.
Dans la ferme perlière d'Abdallah Souwaidi, qui compte une vingtaine d'employés, les huîtres se développent dans des cages suspendues à des bouées qui flottent près du rivage. Après avoir été "ensemencées", environ 60% d'entre elles produiront des perles, contre seulement 1% pour les huîtres sauvages.
Cette technique a mis fin à partir des années 1930 à la pêche aux perles naturelles, qui a autrefois fait la fortune de nombreuses familles émiraties.
Car avant que l'or noir ne fasse du Golfe l'une des régions les plus riches du monde, ses habitants vivaient principalement de la pêche et du commerce de ces petits trésors, très demandés par les joaillers d'Europe et d'Inde.
"Pendant de longues périodes de l'histoire des Emirats, la perle a été au coeur de l'activité économique", explique Peter Magee, chef du service chargé de l'archéologie au département de la culture et du tourisme d'Abou Dhabi.
"Lien profond"
Puis le commerce de la perle naturelle s'est effondré au XXe siècle, lorsque les pays du Golfe se sont concentrés sur la production de pétrole et qu'elle est devenue un produit de luxe inabordable entre les deux guerres mondiales.
"Les perles de culture étaient plus faciles à produire et moins chères, ce qui a dévalué le statut autrefois prestigieux des perles des Emirats", souligne M. Magee.
Entourée de mangroves, de montagnes et de chameaux paissant près du rivage, la ferme perlière d'Abdallah Souwaidi est située au large de sa ville natale d'Al-Rams, dans l'émirat de Ras al-Khaïmah.
C'est à cet endroit que, jeune garçon, il accompagnait son grand-père pour plonger à la découverte des perles naturelles, une tradition qui le fascine encore aujourd'hui.
L'activité de ce passionné, lancée en 2005, reflète une prise de conscience croissante des traditions culturelles qui font la fierté des Emirats, telles que la fauconnerie et les courses de chameaux.
En octobre, les autorités d'Abou Dhabi ont annoncé que la plus ancienne perle naturelle du monde, découverte près de l'île de Marawah au large de la capitale émiratie, serait exposée pour la première fois, au Louvre Abu Dhabi, antenne locale du célèbre musée français.
Cette perle de 8.000 ans remonte à la période néolithique et donne la preuve d'une activité humaine dans la zone à cette époque.
"Le fait qu'il s'agisse de la plus ancienne perle connue au monde est un rappel du lien profond qui unit les Emirats à la mer", estime Peter Macgee.
"Nulle part ailleurs"
A bord d'un dhow, boutre traditionnel sur lequel les pêcheurs embarquaient des mois durant lors de la saison de la pêche aux perles, Abdallah Souwaidi troque sa robe blanche pour une combinaison de plongée noire.
Pour les visiteurs étrangers et locaux, il saute à pieds joints dans l'eau pour montrer comment ses ancêtres ramassaient les huîtres dans les fonds marins.
Ses outils sont simples: une pierre de lestage suspendue à son pied, un bouchon nasal et un panier.
Pour M. Souwaidi, qui vend ses perles à des créateurs locaux et internationaux, son activité ne vise pas seulement à générer des bénéfices mais aussi à transmettre une tradition à la nouvelle génération d'Emiratis et aux touristes qui s'aventurent jusqu'à sa ferme.
"Quand les gens viennent aux Emirats, ils veulent voir quelque chose qu'ils n'ont vu nulle part ailleurs", assure cet entrepreneur, ajoutant que la pêche de perles peut se targuer de surcroît d'une empreinte écologique faible.
Montrant du doigt les chameaux qui broutent sans se soucier de lui, et les flamants roses qui continuent de chercher des poissons dans l'eau, M. Souwaidi se félicite: "Regardez, nous pouvons aller et venir calmement", sans troubler l'environnement.
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