Il faut garantir "à nos enfants un avenir dans la dignité", a insisté le souverain pontife, dans une première prise de parole jeudi devant les autorités politiques et civiles de la Thaïlande, où il était arrivé la veille.
François a évoqué, sans parler de pays spécifiques, "ces femmes et à tous ces enfants de notre temps rendus particulièrement vulnérables, violentés et exposés à toutes les formes d'exploitation, d'esclavage, de violence et d'abus".
L'Asie du Sud-Est compte encore de nombreux cas d'exploitation sexuelle des plus jeunes. Dans la région, "près de 70% des victimes de trafic à des fins d'exploitation sexuelle ont en dessous de l'âge légal", relève l'Office des Nations unies contre la drogue et le crime dans son dernier rapport 2019.
Des dizaines de milliers d'enfants sont notamment exploités via webcam, tout particulièrement aux Philippines, mais aussi en Indonésie, au Cambodge et en Thaïlande.
Devant le Premier ministre Prayut Chan-O-Cha, le pape a pris soin de louer les efforts de la Thaïlande pour tenter d'"éliminer ce fléau".
La possession de matériel pédopornographique est considérée comme un crime depuis 2015 dans le royaume. La même année, une force spéciale chargée d'enquêter sur l'exploitation sexuelle des enfants sur internet a été mise en place dans le pays.
95% de bouddhistes
Le pape a également abordé l'un de ses thèmes fétiches, les défis migratoires "l'un des principaux problèmes moraux qu'affronte notre génération". Mercredi, dans un message envoyé à un rassemblement de la jeunesse catholique au Vietnam, il avait eu une pensée pour les les trente-neuf migrants vietnamiens retrouvés morts le mois dernier dans un camion au Royaume-Uni.
Le pape argentin de 82 ans, fervent adepte du dialogue interreligieux, a rencontré le 20e patriarche suprême, Somdej Phra Maha Muneewong, dans un haut lieu du bouddhisme, religion pratiquée à plus de 95% dans le royaume.
Avant de rentrer dans le temple historique du patriarche à Bangkok, François a pris le soin d'enlever ses souliers foulant les tapis du temple en chaussettes noires, certains cardinaux l'accompagnant dévoilant leurs chaussettes rouges.
Puis il a écouté attentivement les paroles de son hôte bouddhiste, pieds nus et drapé du traditionnel "jee worn", habit ocre dévoilant une épaule.
"Depuis l'arrivée du christianisme en Thaïlande, voici quatre siècles et demi, les catholiques, bien que minoritaires, ont joui de la liberté dans leur pratique religieuse et ont vécu de nombreuses années en harmonie avec leurs frères et soeurs bouddhistes", a loué le pape.
Et il a exprimé son engagement personnel pour "le renforcement d'un dialogue ouvert et respectueux au service de la paix", appelant à des initiatives communes de charité envers les pauvres.
La Thaïlande compte environ 300.000 moines, répartis dans 40.000 temples. Evangélisée par des missionnaires jésuites au milieu du XVIe siècle, les quelque 400.000 catholiques y sont ultra-minoritaires.
Le pape avait commencé sa journée par un entretien privé avec le Premier ministre. Prayut Chan-O-Cha, après avoir été à la tête d'une junte militaire pendant cinq ans, a été nommé chef du gouvernement civil à l'issue d'élections législatives controversées en mars.
Le souverain pontife rencontrera aussi dans la journée le roi de Thaïlande, Maha Vajiralongkorn. Monté sur le trône au décès de son père Bhumibol Adulyadej en 2016, Rama X, a été couronné en mai dernier.
Le monarque, l'un des plus riches du monde, protégé par une draconienne loi de lèse-majesté qui punit très sévèrement toute critique à son encontre, est le garant de l'unité du royaume, qui a connu douze coups d'Etat depuis 1932.
Lors de cette journée marathon, François s'est aussi rendu dans un hôpital de la ville, où il a notamment rencontré cinq enfants de Khlong Toei, le plus grand bidonville de Bangkok où s'entassent 100.000 habitants.
Fast, 12 ans, l'un des très rares catholiques du quartier, est l'un d'entre eux.
"Je ne connais pas grand-chose du pape, mais je sais qu'il vient d'Argentine et qu'il aime les pauvres", a-t-il raconté à l'AFP avant sa rencontre.
François reste jusqu'à samedi en Thaïlande, puis s'envolera vers le Japon, une deuxième étape beaucoup plus politique puisqu'il se rendra à Nagasaki et Hiroshima, où il y a 74 ans des bombes atomiques américaines firent respectivement 74.000 et 140.000 morts.
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