Par cette immersion et en revendiquant la Picardie de son enfance, le chef de l'Etat va tenter de casser l'image de "président déconnecté" des territoires qui lui colle à la peau depuis le début de son quinquennat.
Il est au contraire "très fier de ses racines picardes", affirme son entourage.
Il s'agit de sa première visite à Amiens depuis un court déplacement en octobre 2017 ayant suivi celui de l'entre-deux tours de la présidentielle de 2017, tous deux marqués par le sort de l'usine Whirlpool, l'un des principaux sites industriels de la ville.
Cinq mois après son élection, Emmanuel Macron visitait fièrement l'usine avec un repreneur, largement aidé par l'Etat, qui devait sauver une partie des emplois.
Deux ans plus tard, c'est la liquidation de WN, la société choisie pour reprendre le site, désormais devenu une "usine fantôme", selon Patrice Sinoquet, représentant CFDT.
La rencontre prévue vendredi matin entre Emmanuel Macron et les ex-salariés s'annonce rude. "On va lui demander des comptes!", ont-ils prévenu.
Le président, lui, va leur dire "qu'il y a un avenir si on se bat", prévient-il dans un entretien mercredi soir au Courrier Picard: "C'est moi qui ai demandé à les voir. Parce que je suis venu en campagne à un moment où ils avaient peur pour leur avenir. Je leur ai tenu un langage de vérité. (...) Et comme eux j'y croyais. Comme eux j'ai été déçu."
Pas moins de huit ministres l'accompagneront, témoignant de la diversité de la dizaine d'étapes de cette visite marathon. Qui débutera par l'inauguration du nouveau pôle universitaire de la Citadelle, aménagé par le célèbre architecte Renzo Piano.
Le président y dialoguera avec des étudiants, sur fond de protestation dans plusieurs facs après l'acte désespéré d'un étudiant de 22 ans, qui a tenté de s'immoler par le feu à Lyon.
Dans la soirée, Emmanuel Macron s'adressera aux jeunes pour lancer les festivités d'"Amiens, capitale européenne de la jeunesse 2020".
Avec son épouse Brigitte, également originaire de la ville, il ira auparavant au contact des Amiénois en assistant au son et lumière consacré au 800e anniversaire de la cathédrale, considérée comme l'une des plus belles de France.
Pour l'occasion, d'importantes mesures de sécurité ont été prises dans le centre-ville, où un appel à se rassembler a été lancé sur Facebook par un groupe de "gilets jaunes".
"On est très contents que le président vienne, et on le serait encore plus si on peut entrer en contact avec lui et lui dire ce qu'on vit au quotidien. Car derrière cette vitrine de jolie ville bien propre, il y a des gens qui crèvent de faim, qui dorment dans la rue", a déclaré Mélanie Ngoye-Gaham, porte-parole de ce groupe, "Les réfractaires du 80".
"Apaisement"
Emmanuel Macron sera accueilli par la maire Brigitte Fouré (UDI), qui vient de recevoir le soutien de LREM pour les municipales. Elle affrontera indirectement la députée LREM Barbara Pompili, qui a indiqué qu'elle figurerait sur la liste concurrente de Christophe Porquier, ex-EELV, ex-vice-président de la région Picardie.
François Ruffin, député apparenté LFI de la Somme, a accusé mercredi Emmanuel Macron de venir à Amiens pour "lancer la campagne" de Brigitte Fouré et de confondre "politique partisane et rôle du chef de l'Etat".
Vendredi matin, le chef de l'Etat se rendra dans les quartiers populaires du nord d'Amiens pour inaugurer une maison France Services, qui regroupe plusieurs services publics comme la Poste, Pôle Emploi ou l'assurance-maladie.
Enfin, Emmanuel Macron se penchera sur deux dossiers liés aux transports: l'amélioration des dessertes ferroviaires dans la Somme, avec le nouveau PDG de la SNCF, Jean-Pierre Farandou, et le financement du canal Seine-Nord.
Cette "autoroute fluviale, longue de 107 kilomètres entre Compiègne (Oise) et Aubencheul-au-Bac (Nord), doit faciliter le transport de marchandises entre les pays du Benelux et la région parisienne, et décharger l'autoroute A1 de 500.000 camions par an.
Le chef de l'Etat devrait annoncer la finalisation de son financement, évalué à cinq milliards d'euros, pour une ouverture du canal dans une dizaine d'années.
Une conférence de presse, inédite pour un déplacement en province, clôturera cette visite qui, à la suite du grand débat, doit illustrer la volonté d'"écoute" et d'"apaisement" de l'exécutif, à l'approche de la grève redoutée du 5 décembre à la SNCF et la RATP.
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