S'exprimant devant le congrès de l'Association des maires de France (AMF), le chef de l'Etat a apporté une fin de non recevoir à la demande de la droite qui a été soutenue par certains élus au RN et à gauche. Elle est portée par le président des sénateurs LR Bruno Retailleau, qui a déposé le 8 novembre une proposition de loi pour lutter contre les "listes communautaristes", en pleine polémique sur la laïcité et le voile.
Le sénateur de Vendée a d'ailleurs rapidement réagi aux propos d'Emmanuel Macron en dénonçant "un renoncement de plus", qui "théorise l'impuissance de l'Etat et banalise le communautarisme". Même ton de l'extrême droite: le porte-parole du RN Sébastien Chenu a dénoncé sur BFMTV "l'impuissance" d'un président "hypocrite" dont le parti va "soutenir des élus qui sont mouillés jusqu'au cou dans le communautarisme" comme, selon lui, à Denain ou Maubeuge.
Le chef de l'Etat a défendu une position "pragmatique", appelant à "ne pas tout confondre" en soulignant que ce n'est en "aucun cas un cadre de combat ou d'exclusion" contre une partie de la société française.
Pour lui, "il ne s'agit pas de proclamer l'interdiction" des listes communautaires "pour régler le problème".
"Nous avons des règles claires. Faut-il les bousculer parce que, soudain, les esprits s'échauffent? Je nous appelle collectivement à la prudence" pour "voir toutes les conséquences de ce qu'on propose", a-t-il estimé.
"Comment définir" une liste communautaire? "Qui en serait le juge et selon quels critères?", a-t-il interrogé. "Qui peut penser d'ailleurs que de telles listes se présenteront à visage découvert?", a-t-il ajouté, en soulignant que "ceux qui développent un projet communautariste, cet islam politique (...) très souvent se dissimulent".
Surveiller l'après-élection
Dans sa demande, M. Retailleau a visé nommément l'Union des démocrates musulmans français (UDMF), un micro-parti créé en 2012 qui a recueilli moins de 29.000 voix aux Européennes, avec cependant des pics dans quelques communes en région parisienne.
Sa proposition de loi vise notamment à empêcher le dépôt de listes ou le financement de candidats menant une "campagne communautariste" et soutenant des revendications "fondées sur l'origine ethnique ou l'appartenance religieuse".
Mais pour le député LFI Adrien Quatennens, "il est extrêmement compliqué de définir ce qu'est une liste communautaire". "Si Emmanuel Macron choisit de ne pas interdire, cela ne nous empêchera pas de croiser le fer sur le fond avec toutes celles et ceux qui seraient nos adversaires politiques", selon lui.
Visant "l'islam politique" et "l'islamisme politique" de ceux qui ont "un projet de séparation d'avec la République", Emmanuel Macron a affirmé que le gouvernement annoncerait "des actions nouvelles concrètes dans les prochaines semaines".
Ces mesures porteront avant tout sur les décisions que pourraient prendre des élus, une fois passé le scrutin, a précisé à l'AFP Sébastien Lecornu, ministre chargé des Collectivités. "Quand nous avons un doute, le contrôle de légalité du préfet sur leurs actes doit être revisité et plus systématique", a-t-il expliqué.
En donnant trois exemples: l'octroi de subventions, en vérifiant qu'elles ne sont pas en la faveur d'associations communautaristes; l'organisation des services publics communaux comme des horaires différenciés à la piscine pour femmes et hommes, les repas dans les cantines scolaires; les pouvoirs de police du maire, afin de vérifier que leur usage se fait bien au nom d'un trouble à l'ordre public et non pas pour des raisons communautaristes, comme l'interdiction d'un spectacle. Les procédures de suspension et de révocation des maires et adjoints pourront être précisées et durcies, selon lui.
Dans son discours, Emmanuel Macron a rappelé que 12 lieux de culte avaient été fermés, ainsi que quatre écoles hors contrat, 9 établissements associatifs et près de 130 débits de boissons.
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