Témoignant de la colère de nombreux jeunes, ces rassemblements ont perturbé les cours sur des campus de Lyon et Lille. A la faculté de droit de Lille, une conférence de François Hollande a dû être annulée.
Brûlé à 90%, l'étudiant de 22 ans qui s'est immolé vendredi était toujours "entre la vie et la mort" mardi. En difficulté financière - il avait perdu sa bourse en "triplant" sa deuxième année de licence à l'université Lyon 2 - il a expliqué son geste dans un message lu mardi par une camarade.
"Aujourd'hui je vais commettre l'irréparable, si je vise le bâtiment du Crous ce n'est pas par hasard, je vise un lieu politique, le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, et par extension le gouvernement", indiquait l'étudiant avant de passer à l'acte.
"Cette année, faisant une troisième L2, je n'avais pas de bourse mais même quand j'en avais, 450 euros par mois, est-ce suffisant pour vivre ?", ajoutait-il en reprenant des revendications sur le salaire étudiant.
Plusieurs centaines d'étudiants se sont réunis dans la matinée devant le siège du Crous à Lyon. "On attend que les pouvoirs publics prennent leurs responsabilités", a affirmé parmi eux Bastien Pereira Besteiro, militant Sud Education.
"Il n'est pas normal que des étudiants doivent en venir à de telles extrémités pour faire entendre l'absurdité kafkaïenne de ce système qui broie les étudiants, qui les précarise", a-t-il encore protesté.
A Saint-Étienne, ville dont l'étudiant immolé est originaire, 150 personnes s'étaient aussi réunies. Un de ses cousins a salué "son acte héroïque", lançant aux participants: "continuez à vous battre, c'est ce qu'il voudrait".
"Il voulait se faire entendre pour des causes justes. Il était maxi intelligent, étudiant en sciences politiques, c'était la fierté de la famille", a-t-il poursuivi les larmes aux yeux.
Samedi, Nathalie Dompnier, présidente de Lyon 2, avait assuré à l'AFP que l'établissement n'avait pas connaissance "de difficultés personnelles" concernant l'étudiant.
"Emotion légitime"
Selon le syndicat Solidaires étudiant-e-s, qui a appelé aux rassemblements de mardi dans une quarantaine de villes, ce geste "extrême" illustre une situation de précarité "commune".
Sophie, étudiante en 3e année de sciences sociales, affirme avoir été "radiée du Crous car hospitalisée".
"Je n'ai pas pu assister à certains examens. A cause de ça j'ai dû redoubler et le Crous m'a coupé les vivres", explique celle qui dit devoir "faire les poubelles pour manger" et "cumuler plusieurs emplois".
A la mi-journée, la manifestation a débordé sur le campus de l'université Lyon 2 et la présidence a annoncé la fermeture administrative de tous les bâtiments "en raison d'un blocage en cours et d'actes de vandalisme".
Dans le Nord, quelque 300 à 400 personnes se sont rassemblées à la mi-journée devant le Crous de Lille avant de pénétrer dans la faculté de droit où ils ont empêché de se tenir une conférence de François Hollande sur la crise de la démocratie.
L'intrusion s'est faite aux cris de "Lyon, Lyon, ni oubli, ni pardon", "Hollande assassin!" - certains déchirant les pages de son dernier livre.
Dans une réaction transmise à l'AFP, l'ancien président a dit comprendre une "émotion légitime après le geste désespéré d'un étudiant à Lyon", regrettant toutefois "que cette émotion se soit transformée en violence".
A Bordeaux, environ 150 étudiants se sont rassemblés devant le Crous, à la façade duquel ils ont accroché des banderoles et renversé des poubelles avant de défiler en scandant "Crous responsable, État coupable!"
Le sujet, très sensible en cette période sociale plutôt tendue dans le pays, a également agité mardi les rangs de l'Assemblée nationale, où un vif échange a opposé la députée Danièle Obono (LFI) au secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'Education Gabriel Attal.
Lors des questions au gouvernement, celle-ci a accusé les "politiques anti-sociales" du Premier ministre d'avoir poussé l'étudiant à s'immoler. "Vous préférez les laisser crever et désigner comme bouc émissaire les migrants et les étudiants", a-t-elle lancé, quand M. Attal a fustigé en retour son "incantation dangereuse".
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