Ce coup de feu, qui a été filmé et retransmis en direct sur Facebook, illustre à nouveau la dégradation de la situation dans l'ex-colonie britannique, qui vit depuis cinq mois sa plus grave crise politique depuis sa rétrocession à la Chine en 1997.
Sur les images, on voit un policier essayant de maîtriser une personne à blouson blanc dans le quartier de Sai Wan Ho, dans le nord-est de l'île de Hong Kong, à un carrefour bloqué par des manifestants.
Un autre homme masqué, vêtu de noir, s'approche et le policier lui tire visiblement sur le torse. Des personnes se ruent sur le policier puis s'éloignent. L'homme tombe au sol puis s'assoit en se tenant l'abdomen, tente de se relever avant d'être maîtrisé à terre par le policier.
Deux autres coups de feu retentissent. A côté d'eux, un autre policier immobilise au sol un autre manifestant en noir. Les deux ont été arrêtés.
Appel à la grève
Une source policière a confirmé à l'AFP, sous le couvert de l'anonymat, que trois tirs à balles réelles avaient été effectués et qu'une personne avait été touchée à Sai Wan Ho. Une photo du média Cupid News montre les deux manifestants à terre, dont un près d'une traînée de sang.
Des sources hospitalières ont précisé que trois personnes avaient été hospitalisées, dont une pour une blessure par balle.
En dépit de manifestations et actions quasi quotidiennes depuis juin, et de plus en plus violentes, l'exécutif local comme le gouvernement chinois se sont refusés à toute concession aux manifestants qui demandent notamment des réformes démocratiques et une enquête sur le comportement de la police.
La tension s'est encore accrue après le décès vendredi d'un homme de 22 ans, Alex Chow, tombé cinq jours plus tôt d'un parking à étages lors d'affrontements dans le quartier de Tseung Kwan O, dans l'est. Si les circonstances de cette chute demeurent obscures, il est le premier étudiant à décéder depuis le début des manifestations.
Depuis son décès, des veillées rassemblent des dizaines de milliers de personnes quotidiennement.
Et un appel à la grève générale avait été lancé pour ce lundi.
Lacrymogènes
Très tôt, à l'heure de pointe, plusieurs quartiers ont été le théâtre d'actions de blocage en tout genre. Des manifestants ont pris pour cible les stations du métro hongkongais, qui est en temps normal d'une remarquable efficacité, ou ont érigé des barricades à certains carrefours.
L'ensemble a eu pour conséquence de paralyser la circulation dans de nombreux quartiers, créant un casse-tête pour les employés tentant d'aller au travail.
Ces manifestations spontanées ont donné lieu à de multiples échauffourées avec les policiers qui ont parfois fait usage de lacrymogènes, notamment à Tseung Kwan O.
Une vidéo mise en ligne par des manifestants montrait notamment un policier tentant de précipiter plusieurs fois sa moto contre des protestataires bloquant une rue.
C'est la troisième fois depuis le début de la mobilisation qu'un manifestant est blessé par un tir à balle réelle. Les deux premières victimes, touchées en octobre, ont survécu.
Colère de la population
En l'absence de solution politique en vue, c'est à la police que l'exécutif hongkongais a confié le soin de gérer cette situation explosive. Et les forces de l'ordre semblent de plus en plus aimanter la colère de la population.
Dans la foulée du tir à balle réelle lundi matin, une foule d'habitants a fait irruption en insultant les policiers qui ont répondu en les arrosant de gaz poivré. De nombreuses arrestations ont été réalisées.
La police a également tiré de nombreuses grenades lacrymogènes avant d'abandonner le carrefour.
Les forces de l'ordre justifient depuis des mois le recours à la force par la violence d'une frange radicale des manifestants qui n'hésite pas à jeter des briques et des cocktails Molotov, et à vandaliser les entreprises accusées d'être favorables aux autorités pro-Pékin.
La cheffe de l'exécutif, Carrie Lam, a refusé de permettre une enquête indépendante sur le comportement de la police, ce qui est une demande clé des manifestants, en affirmant que les forces de l'ordre étaient dotées d'un organisme de surveillance, l'IPCC, chargé d'instruire les plaintes.
Mais un groupe d'experts indépendants, britanniques, néo-zélandais et canadiens, nommés par Mme Lam pour conseiller cette commission de surveillance, vient d'estimer que l'IPCC n'avait pas les moyens de mener sa mission, dans un rapport encore non officiel mais posté samedi soir sur Twitter par un expert britannique.
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