Le sujet n'était pas officiellement à l'ordre du jour dans l'immense salle du centre des congrès de Katowice (Pologne), où des centaines d'officiels abordent depuis mardi des questions très techniques autour de la révision du code mondial de l'AMA et ses standards internationaux.
C'est le patron de l'antidopage russe lui-même, Iouri Ganous, qui a secoué l'assistance, en renouvelant ses attaques contre les autorités sportives de son pays.
"Rusada", l'agence antidopage russe, "est devenue l'otage de la crise provoquée par les actions destructrices et irresponsables des autorités sportives" russes, lors du transfert à l'AMA de ces données de contrôles gardées dans les serveurs de l'ancien laboratoire de Moscou, a lancé le dirigeant à la carrure imposante.
Assis dans le hall, le ministre russe des Sports, Pavel Kolobkov, qui venait d'affirmer que Moscou avait répondu à toutes les demandes de l'AMA, n'a rien laissé transparaître.
"sagesse"
Ce n'est pas la première fois que Iouri Ganous attaque ses autorités. Sa nomination, en 2017, pour sortir Rusada de la crise, après les révélations sur l'existence d'un système de dopage institutionnel en Russie mis en place au moins entre 2011 et 2015, avait été perçue comme un gage de sérieux.
Mercredi, il a réaffirmé que Rusada "n'avait rien à voir avec la base de données" transmise par Moscou et a demandé à l'AMA d'en tenir compte et de faire preuve de "sagesse" dans ses éventuelles sanctions.
Si beaucoup de ses collègues d'autres pays saluent le "courage" et la "détermination" de Iouri Ganous, le patron de l'antidopage américain, Travis Tygart, partisan de sanctions fortes contre la Russie, y voit plutôt "un jeu très bien orchestré". Dans quel but ? Dédouaner Rusada, alors que c'est cette structure qui devra rendre des comptes à l'AMA. "C'est exactement ce que le gouvernement veut qu'il dise", a assuré le chef de l'Usada, l'agence américaine antidopage.
La révélation, le 23 septembre dernier, de ses soupçons de manipulation a relancé la crise russe, alors que la remise des données électroniques, début janvier, était une condition de l'AMA pour sortir... de la crise précédente.
JO de Tokyo
L'Agence mondiale antidopage, dont les services ont commencé à analyser ces millions de données, espère constituer des dossiers disciplinaires contre des sportifs dopés, protégés par l'ancien système mis en place en Russie.
Elle a déjà transmis 47 dossiers aux fédérations internationales. Mais les experts informatiques de l'université de Lausanne qu'elle a missionnés ont décelé des "incohérences" dans les données. L'AMA n'a pas livré de détails, mais selon Iouri Ganous, le but aurait été d'effacer encore une fois des résultats de contrôles positifs, pour épargner des sportifs, des soupçons confirmés à l'AFP par des sources dans l'antidopage.
Ce qui a changé entre le début de la crise, fin 2014, et le dernier épisode, c'est que désormais l'AMA dispose d'un nouveau règlement qui pourrait lui permettre d'imposer des sanctions sportives à la Russie, aux côtés d'une éventuelle suspension de Rusada.
Depuis les révélations sur un système de dopage impliquant des rouages de l'Etat, pour blanchir des centaines de contrôles positifs et trafiquer les échantillons d'urine aux JO de Sotchi-2014, beaucoup de voix ont critiqué l'indulgence des institutions sportives, en premier lieu le Comité international olympique (CIO), l'un des piliers de l'AMA.
Iouri Ganous avait confié à l'AFP il y a deux semaines ses craintes d'une exclusion lors des JO de Tokyo, l'été prochain. De telles sanctions de l'AMA, qui pourraient intervenir avant la fin de l'année, seraient probablement réexaminées par le Tribunal arbitral du sport (TAS) de Lausanne.
"Il y aura une question sérieuse devant le TAS: est-ce que Rusada peut être tenue responsable pour quelque chose qui a largement échappé à son contrôle ?", demande Travis Tygart.
La conférence mondiale doit se terminer jeudi par l'adoption d'un nouveau code mondial antidopage et l'élection du nouveau président de l'AMA, le ministre polonais des Sports, Witold Banka.
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