Eddie Jones y pense depuis longtemps, il y est désormais. Depuis qu'il a pris les rênes du XV de la Rose il y a un peu moins de quatre ans après le fiasco du Mondial-2015 (élimination en poules à domicile), le sélectionneur clame vouloir lui apporter sa deuxième couronne mondiale, après celle de 2003. Et depuis le tirage au sort, en mai 2017, il pense à cette probable confrontation.
Place aux actes, donc, et aux All Blacks, qui eux n'avaient pas besoin d'un redresseur de tort: ils ont de nouveau dominé la planète ovale il y quatre ans, pour la troisième fois (après 1987 et 2011), et s'avancent invaincus dans la compétition depuis 2007.
Les retraites des totems Richie McCaw, Dan Carter, Ma'a Nonu et Conrad Smith semblent avoir glissé sur leur tunique noire, qui a remporté 86% de ses rencontres depuis la dernière édition.
Il leur arrive de perdre, six fois exactement, et l'on jurerait qu'un septième revers peut survenir samedi, et ainsi leur couper la route vers un triplé qui les placerait encore un peu plus seuls au sommet du rugby.
Parce que, depuis environ un an, ils semblent moins intouchables qu'au lendemain du Mondial-2015, où ils avaient étiré leur série de succès à 18 (jusqu'en novembre 2016). Pour tenter de surprendre au Japon, l'encadrement piloté par Steve Hansen a d'ailleurs tenté un coup en replaçant l'ouvreur Beauden Barrett à l'arrière.
Bataille tactique
Parce que l'Angleterre paraît beaucoup mieux outillée que l'Irlande, laminée en quart de finale (46-14), pour "changer l'histoire du rugby samedi", selon les mots de Jones. Elle a rossé l'Australie au tour précédent (40-16) et accumulé automatismes et confiance, notamment au fil de 18 matches victorieux de rang, jusqu'en mars 2017.
Le XV de la Rose pique devant, avec ses gros porteurs de balle (les frères Vunipola, Itoje, Tuilagi), auxquels les All Blacks, aussi bien pourvus (Retallick, Whitelock, Read, Savea), devront "rendre coup pour coup" selon leur entraîneur-adjoint Ian Foster, qui s'attend à "une bonne bataille à l'ancienne". "Un combat de boxe entre deux poids lourds, l'un en noir, l'autre en blanc", a imagé de son côté Jones.
Une bataille tactique aussi, entre les ouvreurs anglais George Ford et Owen Farrell, de nouveaux associés par Jones pour balader au pied la Nouvelle-Zélande de Barrett et Richie Mo'unga. Elle aussi a tenté un coup tactique, en déplaçant de la "cage" à la troisième ligne Scott Barrett pour gêner l'alignement anglais, comme en novembre dernier à Twickenham.
"Pour l'histoire"
Les All Blacks s'étaient imposés d'un souffle (16-15) pour infliger à l'Angleterre, qui s'était vu refuser un essai pour un hors jeu d'une courte tête, sa 33e défaite dans les confrontations entre les deux équipes -- elle n'en a remporté que sept, la dernière en novembre 2012 (38-21).
"Nous avons appris contre la Nouvelle-Zélande en novembre dernier qu'il ne fallait jamais relâcher son attention. Nous leur avons permis de revenir dans le match. C'est la grande leçon que nous avons tirée", a expliqué Jones.
En vieux routier du circuit international le madré Australien, vice-champion du monde en 2003 avec les Wallabies, s'est évertué cette semaine à mettre la pression du côté néo-zélandais, par ses déclarations ou la révélation d'une présumée tentative d'espionnage de l'entraînement de son équipe, mardi.
La pression, Hansen la prend volontiers, avant d'en boire une avec Jones après la rencontre: "Avant, nous la fuyions, désormais nous l'assumons. Nous l'avons à chaque match, que ce soit un quart de finale, une demi-finale ou un simple test-match. Mais il faudrait être très naïf pour ne pas reconnaître qu'elle pèsera sur les deux équipes" dans ce "match pour l'histoire". Le terme ne semble pas usurpé.
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