Une semaine après le déclenchement d'une vague de contestation sans précédent depuis des décennies dans un pays considéré comme un des plus stables d'Amérique latine, la mobilisation ne cédait pas.
La gouverneure de la région de Santiago, Karla Rubilar, a fait part de son "émotion" face à la participation massive à cette manifestation qui a réuni, selon elle, "plus d'un million de personnes à Santiago et différentes régions du pays".
Auparavant, la mairie de Santiago a déclaré dans un tweet que, selon la police, "plus de 820.000 personnes" étaient rassemblées dans le centre de la capitale.
Dans sa première réaction, le président conservateur Sebastian Pinera a dit avoir "entendu le message" délivré par les manifestants.
"La foule, joyeuse et pacifique, défile aujourd'hui, avec des Chiliens qui demandent un Chili plus juste et solidaire, cela ouvre de grands chemins d'avenir et d'espérance", a déclaré le chef de l'Etat sur Twitter. "Nous avons tous entendu le message", a-t-il ajouté.
Les manifestants, brandissant des drapeaux chiliens et entonnant des chants popularisés pendant la période de la dictature d'Augusto Pinochet (1973-1990), se sont rassemblés sur la Plaza Italia, devenue l'épicentre du mouvement de contestation, ainsi que dans plusieurs avenues adjacentes, ont constaté des journalistes de l'AFP.
"Ce sera probablement le plus grand rassemblement de tous les temps", s'enthousiasmait Francisco Anguitar, 38 ans, un agent de développement en intelligence artificielle, dans le cortège de Santiago. "Nous demandons justice, honnêteté, éthique au gouvernement. Nous ne voulons pas le socialisme, le communisme, nous voulons moins d'entreprises privées, plus d'Etat", a-t-il ajouté.
Le premier effet de cette mobilisation, "c'est que nous n'aurons plus jamais à subir d'abus, plus jamais. Les gens sont prêts à faire le sacrifice, si nous devons tout arrêter pendant une semaine, un mois, nous allons le faire, peu importe ce que cela nous coûte", a déclaré Carlos Lazo, un retraité de 77 ans.
Plusieurs dizaines de milliers de personnes ont également manifesté dans plusieurs autres grandes villes du Chili.
Alors qu'une grande partie du pays et la capitale restaient sous état d'urgence, avec 20.000 policiers et militaires déployés, la manifestation dans la capitale s'est déroulée globalement dans une ambiance festive.
Une atmosphère qui contrastait avec les violentes émeutes qui ont éclaté il y a une semaine, avec des saccages et des pillages de dizaines de stations de métro, de stations-service et de supermarchés.
Des incidents sporadiques ont eu lieu en fin de manifestation, avant l'application d'un septième couvre-feu nocturne -- 23H00 à 04H00 (02H00-07H00 GMT) -- pour les 7,5 millions d'habitants de Santiago.
Devant le palais présidentiel de La Moneda, les forces de l'ordre ont eu recours brièvement à des lances à eau, des gaz lacrymogène et des lanceurs de balle de défense pour disperser quelques manifestants, a constaté l'AFP.
"Une deuxième transition"
L'annonce mardi par M. Pinera d'une série de mesures sociales, dont une augmentation du minimum vieillesse, une hausse des impôts des plus riches, et un gel de la hausse de 9,2% de l'électricité, n'a pas eu l'effet escompté.
Plus déterminés que jamais, les protestataires ne relâchaient pas la pression sur le pouvoir chilien.
Dans la matinée, des centaines d'automobilistes et de chauffeurs routiers avaient participé à des opérations escargot sur les autoroutes qui relient Santiago au reste du pays pour protester contre les prix des péages, provoquant d'importants embouteillages, a constaté l'AFP.
"Nous, les petits transporteurs, nous sommes accablés par les prix des autoroutes (...) nous rejoignons la mobilisation", a déclaré à l'AFP Marcelo Aguirre, un chauffeur de 49 ans.
La question du prix du transport avait déjà été le détonateur de ce mouvement social inédit, lorsque les étudiants avaient appelé à protester contre une augmentation de plus de 3% du prix du ticket de métro dans la capitale.
Malgré la suspension de la mesure, la colère sociale n'est pas retombée. Le mouvement, hétérogène et sans dirigeants identifiables, s'est amplifié, nourri par le ressentiment face à la situation socio-économique et aux inégalités dans ce pays de 18 millions d'habitants.
L'énorme mobilisation de vendredi "constitue un point d'inflexion après trente années marquées par une dépolitisation croissante depuis 1989", alors que commençait la transition démocratique mettant fin au régime d'Augusto Pinochet, a déclaré à l'AFP Marcelo Mella, politologue à Université de Santiago.
Le mouvement "interpelle les dirigeants politiques pour qu'ils impulsent des changements profonds dans le modèle de développement capitaliste. Une sorte de deuxième transition", a-t-il ajouté.
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