Le principal rival de M. Morales, le libéral Carlos Mesa, a annoncé la formation d'un collectif de partis politiques de droite et du centre, baptisé "Coordination de défense de la démocratie", pour faire pression en vue de l'organisation d'un second tour. Et ce alors qu'Evo Morales semblait sur le point, selon les résultats officiels distillés au compte-gouttes, de se proclamer vainqueur dès le premier tour.
Mercredi soir, de nouveaux incidents ont éclaté à La Paz entre forces de l'ordre et manifestants près de l'hôtel hébergeant les membres du Tribunal suprême électoral (TSE).
"Plus jamais, Evo plus jamais!", chantaient les protestataires.
Des manifestants proches de l'opposition bloquaient les axes de Santa Cruz (est), capitale économique et principale ville du pays d'où est partie la grève nationale.
"Ce mouvement va durer jusqu'à ce qu'on nous confirme le second tour", a lancé à la foule Luis Fernando Camacho, le président de l'influent Comité Pro-Santa Cruz, une organisation conservatrice rassemblant commerçants, entrepreneurs et simples citoyens.
La grève était diversement suivie à travers le pays. De violents affrontements ont opposé pro et anti-Morales dans un quartier de Santa Cruz tenu par des partisans du président, faisant au moins deux blessés, a constaté l'AFP.
Une partie des Boliviens, qui dénonce une "autocratie", n'a pas digéré la décision de M. Morales de briguer un quatrième mandat, alors que les électeurs s'étaient prononcés contre à l'occasion d'un référendum en 2016.
Pendant ce temps, le lent comptage officiel des votes se poursuivait. Pour éviter un second tour, le candidat en tête doit obtenir la majorité absolue ou au moins 40% des suffrages et 10 points de pourcentage d'écart sur le deuxième.
Vers 22H00 (02H00 GMT de jeudi), un peu plus de 2% seulement des bulletins restaient à dépouiller. M. Morales était crédité de 46,24% des voix contre 37,18% pour Carlos Mesa, soit une avance proche des 10 points de pourcentage nécessaires.
"Nous sommes la majorité"
Evo Morales, qui a qualifié la grève générale de "coup d'Etat" ourdi par la droite, s'est dit "quasi sûr et certain" d'être réélu au premier tour grâce au "vote des régions rurales".
M. Morales, 59 ans, devait à nouveau s'exprimer devant la presse jeudi à 7H00 (11H00 GMT). Il a appelé ses supporters à la mobilisation.
En réponse, plusieurs milliers de mineurs, indiens et travailleurs, se sont réunis mercredi dans le calme sur la place San Francisco de La Paz, avec l'église coloniale du même nom et les montagnes en toile de fond.
"Mesa n'est pas pour nous (les indigènes). Nous n'allons pas laisser cela arriver, nous sommes la majorité (...) Ils parlent de fraude, mais ils sont racistes et nous discriminent. Avant, les soeurs (indigènes) ne pouvaient pas entrer dans les bureaux, aujourd'hui ce n'est plus le cas. On ne veut pas revenir au passé", confie Justina Loza, 43 ans, femme portant chapeau melon et "pollera", une lourde robe traditionnelle.
Une nouvelle manifestation devait partir mercredi d'El Alto, banlieue populaire de La Paz, considérée comme acquise à M. Morales.
Carlos Mesa, 66 ans, a de son côté appelé ses partisans à la "mobilisation permanente".
La mission d'observation électorale de l'Organisation des Etats américains (OEA) en Bolivie a pour sa part estimé mercredi que la "meilleure solution" serait de déclarer un ballotage entre les deux candidats.
L'église catholique a abondé en ce sens, voyant dans un second tour la "seule issue pacifique et concertée".
En parallèle, l'OEA a accepté de procéder à un audit du processus de dépouillement à la demande du gouvernement.
Le président du Venezuela Nicolas Maduro a apporté son soutien à Evo Morales, dénonçant lui aussi un "coup d'Etat annoncé".
Après de premiers chiffres partiels, dimanche soir, laissant entrevoir un second tour inédit, de nouveaux résultats diffusés lundi par l'autorité électorale avaient pratiquement donné la victoire au chef de l'Etat sortant, suscitant de la part de l'opposition et des observateurs internationaux des soupçons de fraude.
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