Les prévenus "ont violé plusieurs obligations de prudence ou de sécurité imposées par la loi et le règlement. Ces violations sont à l'origine de l'incendie qui est la cause directe et certaine" des décès, a affirmé la présidente du tribunal.
Si les deux hommes, condamnés également à une interdiction de gérer un établissement recevant du public, n'ont pas été placés sous mandat de dépôt, la peine de prison ferme "n'est pas aménageable", a-t-elle précisé.
A la fin de la lecture du jugement, des familles des victimes ont fondu en larmes. Certaines ont crié "il a pris perpet' mon fils !" ou "rien à foutre de votre argent, on veut nos enfants !". Les dommages au civil que devront verser les deux condamnés se chiffrent au-delà du million d'euros.
Le parquet avait requis quatre ans de prison ferme à l'encontre de ces deux frères âgés de 40 et 48 ans, estimant que leur établissement situé à Rouen n'était "qu'une somme de manquements en matière de sécurité".
Nacer et Amirouche Boutrif, qui avaient comparu libres au procès qui s'est tenu du 9 au 16 septembre, étaient jugés pour "avoir involontairement causé la mort" de 14 personnes, essentiellement des jeunes de 18 à 25 ans, et en avoir involontairement blessé cinq autres grièvement.
Plusieurs parties civiles ont exprimé leur mécontentement. Me Dominique Lemiegre a fait part à l'AFP "de l'amère déception de ses clients qui trouvaient déjà que les quatre ans requis par le parquet étaient insuffisants".
Le père d'une des victimes a qualifié "d'intolérable" la décision du tribunal correctionnel. Il a dénoncé "le laxisme de la justice et le laxisme de l'État", en faisant référence au manque de contrôle des règles de sécurité. "Les frères vont refaire leur vie dans quelques années avec leur famille, nous, il ne nous reste plus rien, les condamnés ce sont nous".
"pas le hasard"
Le 5 août 2016, des amis fêtaient les 20 ans d'Ophélie dans le sous-sol de 24 m2 de ce bar de Rouen aménagé sans autorisation en boîte de nuit et dont la porte de secours était fermée, lorsque deux bougies du gâteau d'anniversaire, des fontaines à étincelles, ont enflammé le plafond de l'escalier.
Les plafonds de cette cave étaient recouverts de plaques de mousse en polyuréthane insonorisante, matière extrêmement inflammable, ce qui a entraîné une propagation rapide des flammes.
Gauthier, 20 ans, un des trois "miraculés" du Cuba Libre, avait raconté cette terrible soirée à la barre. "J'ai aperçu le feu dans la cage d'escalier. Il était trop tard pour l'éteindre. Plusieurs personnes dont moi se sont précipitées vers la porte de l'issue de secours pour l'ouvrir mais ça n'a pas ouvert", avait-il dit.
Lors de la lecture du jugement, la présidente a estimé qu'"il n'était ni nécessaire, ni réglementaire que cette porte soit verrouillée".
Les parties civiles ont pointé la responsabilité directe des deux gérants dans le drame. "Dans ce dossier, on ne peut pas dire +c'est la faute à pas de chance+. Ce n'est pas le hasard. Les 14 décès sont dus à une succession de fautes toutes aussi coupables les unes que les autres", avait estimé Me Rose-Marie Capitaine, conseil des familles de Florian, Donatien et Mavrick, tous trois décédés dans l'incendie.
Les avocats de la défense avaient, eux, essayé d'élargir le périmètre des responsabilités. Me Akli Aït Taleb, l'avocat de Nacer Boutrif, avait ainsi affirmé que "dès 2014, les policiers savaient ce qu'il se passait dans les sous-sol du Cuba Libre".
Nacer, gérant principal du bar, sans casier judiciaire comme son frère cadet, a admis devant le tribunal des manquements aux règles, après avoir racheté l'établissement en 2003.
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