Deux chalutiers-usines allemand, le Annie Hillina de 85 mètres de long, et hollandais, le Margiris, de 142 mètres de long, ont été aperçus en Manche au début du mois d'octobre 2019. Le deuxième pourrait pêcher à lui seul 250 tonnes de poisson en une seule journée. À titre de comparaison, un seul des trois chalutiers normands de l'armement cherbourgeois n'en tire que 700 tonnes en moyenne par an.
La pêche artisanale mise à mal
"Je ne comprends pas cet engouement médiatique. Ce n'est pas nouveau, cela fait 20 ans qu'une vingtaine de chalutiers pêchent dans la Manche chaque hiver", raconte Sophie Leroy, de l'armement cherbourgeois, qui déplore le manque de contrôle de la Commission européenne sur les quotas de ces navires usines qui pêchent "en toute impunité".
Ce qui est nouveau en revanche, c'est la présence de chalutiers senneurs hollandais en Manche-Est. Ces bateaux pêchent notamment en Baie de Seine depuis une semaine. "C'est la première fois qu'on les voit, ils sont tout neufs et mesure de 30 à 40 mètres de long", a alerté Dimitri Rogoff, le président du Comité régional des pêches maritimes et des élevages marins de Normandie. Le problème ? Cabillaud, encornet, seiche, rouget-barbet… Ces bateaux très performants pêchent les mêmes ressources que celles pêchées par les Normands dans des proportions inégales…
La Direction des pêches maritimes et deux ministres interpellés
En conséquence, le Comité régional des pêches de Normandie a interpellé au niveau national la Direction des pêches maritimes et de l'aquaculture, le lundi 14 octobre 2019, pour demander plus de contrôles sur ces chalutiers qui pêchent à outrance.
Quelques jours après, le vendredi 18 octobre 2019, c'est le député Parti communiste français (PCF) de la sixième circonscription de Seine-Maritime, Sébastien Jumel qui a alerté la ministre de la Transition écologique, Elisabeth Borne, et le ministre de l'Agriculture et de l'alimentation, Didier Guillaume, dans un communiqué, sur "les craintes et la colère légitimes" des pêcheurs normands concernant, notamment, la présence des senneurs hollandais.
"L'État doit activer dans un premier temps, et avec la plus grande diligence, tous les moyens de contrôle dont il dispose et procéder à des contrôles renforcés", a-t-il écrit. Le député demande aussi l'interdiction "de la bande des douze milles nautiques aux chalutiers de plus de 25 mètres en Manche-Est", qui, selon lui serait "salutaire" pour la pêche artisanale régionale.
Un danger pour la biodiversité
Enfin, d'un point de vue écologique, cette pêche intensive va dans le sens inverse d'un maintien en nombre des espèces marines. Quentin Hoerner est le président de l'association manchoise Ambassade des océans basée à Coutances. Lui aussi critique la réglementation de la Commission européenne, pas assez stricte à son goût. Écoutez-le :
Quentin Hoerner
"Ce genre de bateaux est à l'origine de drames survenus en début d'année", prévient-il. En mars 2019, plus de 1 100 dauphins avaient été retrouvés échoués sur la côte atlantique en seulement trois mois. La plupart avaient été pris au piège par les filets de la pêche industrielle. Le président d'Ambassade des océans espère que l'histoire ne se reproduira pas sur les côtes normandes. La Manche abriterait la plus grande colonie de grands dauphins d'Europe.
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