Alors que l'enquête sur les attentats du 13-Novembre touche à sa fin, les magistrats antiterroristes parisiens ont décidé l'ouverture, le 8 octobre, d'une information judiciaire contre le calife autoproclamé de l'EI et son bras droit, présumé mort, Abou Mohammed al-Adnani.
Al-Bagdhadi, 48 ans, et al-Adnani, l'un des stratèges de l'EI surnommé le "ministre des attentats", sont désormais visés par un mandat d'arrêt international émis lundi par les juges d'instructions, a appris l'AFP vendredi de source judiciaire.
Dès 2014 et la proclamation par al-Baghdadi de la restauration d'un "califat" islamique sur des vastes territoires en Irak et en Syrie, l'organisation a lancé un appel à tuer des civils européens et américains. Appels qui se sont intensifiés après les premières frappes aériennes de la coalition internationale contre ses bastions.
Al-Adnani, qui aurait été tué dans une frappe ciblée à l'été 2016, s'était attaché à motiver des jihadistes isolés à passer à l'action dans leur pays d'origine ainsi qu'à superviser des campagnes de terreur en Occident.
Quel rôle ont-ils joué dans la vague d'attentats en Europe, et notamment auprès de la cellule jihadiste franco-belge responsable des attentats du 13 novembre 2015 à Paris et Saint-Denis et du 22 mars 2016 à Bruxelles ?
Un collectif d'avocates de victimes des attentats du 13-Novembre avait réclamé fin août aux juges d'instruction qu'un mandat d'arrêt soit lancé contre le chef de l'EI, estimant qu'il était "a minima complice" de ces attaques.
Mais l'opportunité d'émettre un tel mandat a fait l'objet de débats dans le monde judiciaire, alors que les chances de voir les responsables du groupe État islamique remis à la justice française sont minimes.
"Ennemi numéro 1"
Cette nouvelle enquête, ouverte pour "direction ou organisation d'association de malfaiteurs terroriste criminelle", constitue "une grande avancée", a salué auprès de l'AFP ce collectif de cinq avocates mené par Me Aude Rimailho, qui envisage de se constituer partie civile.
Pour Me Gérard Chemla, un des avocats de la Fédération nationale des victimes d'attentats et d'accidents collectifs (Fenvac), "ces mandats d'arrêts auraient pu être émis dès le début" des investigations après le 13-Novembre. Toutefois, "si par hasard on finit par attraper al-Baghdadi, la France aura vocation à aller l'interroger", s'est-il félicité auprès de l'AFP.
"Al-Baghdadi est l'ennemi numéro 1 pour le monde entier, les chances de le voir apparaître devant un tribunal français sont extrêmement faibles. Mais ce n'est pas une raison pour baisser les bras avant d'avoir commencé", a-t-il conclu.
Outre les attentats du 13-Novembre, le groupe EI a revendiqué ou inspiré plusieurs des attaques jihadistes en France, qui ont fait 255 morts depuis 2015.
Amédy Coulibaly, le tueur de l'Hypercacher le 9 janvier 2015, avait été le premier à faire allégeance au "calife" al-Baghdadi. Un exemple également suivi par les auteurs des attentats de Magnanville (Yvelines) et Saint-Étienne-du-Rouvray (Eure) en 2016, inspirés depuis la Syrie par le propagandiste français Rachid Kassim, lui-aussi présumé mort.
Dans une revendication jugée cette fois opportuniste, l'organisation jihadiste s'est également attribuée la paternité de l'attentat du 14 juillet 2016 à Nice.
Le "califat" d'al-Baghdadi a été déclaré éradiqué le 23 mars, mais le chaos sécuritaire de la région, renforcé par l'offensive turque contre les Kurdes en Syrie, fait craindre une résurgence de l'organisation.
"Le processus est plus avancé en Irak, où son chef Abou Bakr al-Baghdadi et la plupart de ses dirigeants sont désormais basés", estimait mi-juillet un rapport d'experts des Nations unies.
La dernière apparition d'al-Baghdadi remonte à une vidéo de propagande du 29 avril où il appelle ses partisans à continuer le combat. Le chef de l'EI, qui y apparaissait pour la première fois depuis cinq ans, avait promis que son organisation "se vengerait" pour ses membres tués et que le combat contre l'Occident était "une longue bataille".
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