Le dignitaire irakien, qui passe pour faire et défaire les gouvernements, a en outre donné "deux semaines" aux autorités pour annoncer les résultats de leurs enquêtes, dans son prêche de vendredi lu pour lui par un représentant.
Du 1er au 6 octobre, plus de 100 personnes ont officiellement été tuées lors de rassemblements appelant à "la chute du régime", en grande majorité des manifestants abattus par balles, et 6.000 blessées.
"Le gouvernement et les forces de sécurité sont responsables de l'effusion de sang", a lancé Abdel Mahdi Karbalaï, l'un des deux représentants du grand ayatollah Sistani.
"Le gouvernement est responsable quand, sous le regard des forces de l'ordre, des tireurs hors-la-loi visent des manifestants et les abattent ou attaquent des médias pour terroriser leurs employés", a-t-il affirmé.
Les autorités assurent que des "tireurs non identifiés" embusqués sur des toits ou infiltrés parmi manifestants et forces de l'ordre ont tiré sans distinction sur les deux parties.
Manifestants et défenseurs des droits humains assurent, eux, que les forces de sécurité irakiennes ont participé à la répression du mouvement social, parti de Bagdad avant de gagner l'ensemble du sud du pays.
"Ce qui s'est passé démontre une violence sans borne, qui dépasse toutes les limites de l'imagination", a poursuivi Ali Sistani.
Le grand ayatollah a ensuite appelé les autorités à agir "pour mettre fin aux menaces, aux coups, aux enlèvements, aux tirs embusqués et aux violences de ceux qui croient pouvoir jouir d'une totale impunité".
Soutien
Le 4 octobre, le dignitaire avait appelé les autorités à satisfaire les revendications des manifestants, qui ont d'abord réclamé des emplois, des services fonctionnels et la fin de la corruption, avant d'appeler à "la chute du régime".
Après six jours de violences, les autorités avaient reconnu un "usage excessif" de la force une fois, dans un bastion chiite de Bagdad, en faisant porter la responsabilité à l'armée.
Jeudi, la justice a ajouté qu'un policier anti-émeute avait avoué avoir abattu par balles un manifestant dans la province de Babylone, au sud de Bagdad.
Alors que les autorités ont annoncé des "enquêtes exhaustives", Amnesty International les a appelées à enquêter "correctement", d'une part sur l'"usage excessif et mortel" de la force, et d'autre part sur le fait que s'il y avait eu des tireurs en dehors des forces de l'ordre, c'est que celles-ci avaient échoué à protéger les manifestants.
Les autorités ont multiplié les mesures sociales pour répondre aux revendications initiales du mouvement. Mais jusqu'ici, aucune réforme majeure n'a été annoncée.
Agitation habituelle à Bagdad
Fait inédit dans le pays, la contestation n'était issue d'aucun appel de parti ou figure religieuse.
Si les réseaux sociaux sont toujours inaccessibles dans les trois quarts de l'Irak --les secteurs où les manifestations ont eu lieu-- de plus en plus de photos et de vidéos des violences commencent à émerger.
On y voit des protestataires mortellement touchés par balles au torse ou au ventre, ou d'autres courir pour se mettre à couvert sous des feux nourris, ou des jets de canons à eau brûlante.
Les autorités ont décrété trois jours de deuil national, qui a commencé jeudi, sans que cela ne change rien à l'agitation habituelle de Bagdad, deuxième capitale la plus peuplée du monde arabe, où les embouteillages ont repris.
Dans le sud du pays, le calme est également revenu, alors que tous se préparaient au plus grand pèlerinage chiite au monde.
Depuis plusieurs jours, les pèlerins chiites convergent, à pied pour la plupart, vers Kerbala, ville sainte à 100 km au sud de Bagdad.
Le 20 octobre, ils y commémoreront l'Arbaïn qui rassemble des millions de visiteurs, principalement venus d'Irak et d'Iran.
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