Les manifestants, dont certains portaient des boucliers avec l'inscription "garde indigène", avait déjà tenté d'accéder au Parlement lundi.
Les forces de l'ordre, qui bouclaient le quartier, faisaient usage de gaz lacrymogène. En face, des centaines d'hommes au visage masqué et armés de bâtons tentaient de progresser en jetant des pierres. A la fumée des gaz se mêlait celle des barricades incendiées, faites de pneus et branchages.
Après une brève incursion, jusque dans l'hémicycle du Parlement, un groupe de protestataires a été repoussé par des policiers et des militaires, selon la télévision locale.
Des milliers d'indigènes et de paysans continuaient d'affluer vers la capitale équatorienne Quito pour participer mercredi à une manifestation au côté des syndicats.
En face, le gouvernement apparaissait fragilisé, les protestations faisant chuter d'un tiers la production nationale de brut. Les incidents ont poussé l'exécutif à décréter jeudi l'état d'urgence et à se délocaliser dans la ville portuaire de Guayaquil, la capitale économique.
Mardi, le chef de l'Etat Lenin Moreno, 66 ans, a tendu une main aux indigènes en les invitant à dialoguer. Pour l'heure, le camp adverse n'avait pas fait connaître sa réponse.
Ce petit pays andin est secoué depuis début octobre par un mouvement social inédit depuis 2007, marqué par des blocages de routes et de puits pétroliers en Amazonie, des manifestations parfois violentes et des grèves paralysant le pays.
Les pertes de production de l'entreprise d'Etat Petroamazonas s'élevaient mardi à 165.000 barils par jour sur un total de 531.000, selon le communiqué du ministère de l'Energie. Lundi, la baisse de production était de 12%.
L'Equateur, qui a annoncé la semaine dernière son retrait de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP), a extrait quelque 531.000 barils par jour de pétrole brut entre janvier et juillet cette année.
A environ deux kilomètres du palais Carondelet, siège du gouvernement situé dans le centre historique bouclé par la police, les manifestants étaient rassemblés dans le parc El Arbolito, devenu leur camp de base où des hommes armés de bâtons montent la garde, a constaté l'AFP.
"Déstabilisation"
Lundi soir, dans un discours radio-télévisé, le président Moreno a réagi aux troubles en accusant le chef de l'Etat vénézuélien, "le satrape (Nicolas) Maduro", et son propre prédécesseur, Rafael Correa, d'avoir "activé" un "plan de déstabilisation".
En réponse, dans une vidéo diffusée mardi sur les réseaux sociaux, Rafael Correa, qui réside en Belgique, a nié toute tentative de putsch et demandé la tenue d'élections anticipées.
"Il n'est pas question de putsch. En démocratie, les conflits se règlent dans les urnes et c'est exactement ce que nous demandons: (...) avancer les élections en cas de grave agitation sociale, comme celle que nous connaissons", a déclaré l'ex-président (2007-2017), farouche opposant de son ex-allié et successeur Lenin Moreno.
De son côté, la Confédération des nationalités indigènes de l'Equateur (Conaie), principale organe représentatif des peuples autochtones du pays, a pris ses distances avec l'ancien chef de l'Etat et les violences de lundi.
La Conaie "prend ses distances avec la plateforme putschiste du corréisme (courant de l'ex-président), nous luttons pour la sortie de l'Equateur du FMI. Nous ne permettrons pas que ceux qui nous ont criminalisés durant 10 ans récupèrent notre lutte et celle du peuple équatorien", a écrit cet organisme sur Twitter.
"Les actes de vandalisme signalés à proximité du (siège du) Contrôleur général et du Parlement n'ont rien à voir avec nos militants, notre lutte ne sera pas délégitimée", a ajouté la Conaie.
Le Brésil, l'Argentine, la Colombie et quatre autres pays latinoaméricains ont fait part mardi de leur "ferme soutien" au président Moreno.
L'Organisation des Etats américains (OEA), l'Union européenne, les Etats-Unis et l'Espagne ont condamné les violences et appelé au dialogue.
La décision du président Moreno de supprimer des subventions des carburants d'un montant total de 1,3 milliard de dollars (l'économie équatorienne est dollarisée) est entrée en vigueur jeudi. En échange, l'Equateur peut accéder à des crédits d'un montant de 4,2 milliards de dollars du Fonds monétaire international (FMI).
Cela a entraîné des hausses des prix des carburants allant jusqu'à 123%. Le litre est ainsi passé en moyenne de 0,48 à 0,63 dollars, selon le site globlapetrolprices.com.
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