Barham Saleh a appelé lundi soir les "fils d'une même nation" à mettre fin à "la dissension", la voix étranglée par moments, alors que le matin même l'armée reconnaissait avoir fait un "usage excessif" de la force dans le remuant quartier de Sadr City à Bagdad, qui a sombré dans une nuit de chaos dimanche.
Depuis le début le 1er octobre du mouvement de contestation à Bagdad et dans des villes du sud pour réclamer emplois, services publics et dénoncer la corruption, plus de 100 personnes ont été tuées, en grande majorité des manifestants, et plus de 6.000 blessées, selon un dernier bilan officiel.
L'Iran a dit voir un "complot" dans ce mouvement inédit car spontané et sans parrain politique ou religieux affiché. Et ce "complot" a "échoué", a tranché lundi le Guide suprême iranien Ali Khamenei.
Lundi soir, M. Saleh a lui exhorté les 40 millions d'Irakiens à empêcher "l'ingérence de l'étranger", dans un pays pris en étau entre ses deux grands alliés, l'Iran et les Etats-Unis.
Il a proposé une sortie de crise avec un dialogue "franc", un remaniement ministériel et de nouvelles instances de supervision pour tenter de juguler la corruption, qui a englouti plus de deux fois le PIB irakien ces 16 dernières années.
Avant lui, le chef du Parlement Mohammed al-Halboussi et le Premier ministre Adel Abdel Mahdi avaient multiplié propositions et annonces sociales pour tenter d'apaiser la colère des manifestants, qui disent n'avoir "plus rien à perdre" dans un riche pays pétrolier où plus d'un habitant sur cinq vit sous le seuil de pauvreté.
"Usage excessif"
Le Parlement a de nouveau annoncé une réunion mardi après-midi, après que celle de samedi n'a pu s'ouvrir, faute de quorum. Les députés du bloc de Moqtada Sadr, très influent et très versatile leader chiite vainqueur des législatives, avaient boycotté cette séance, avec d'autres.
Dans son bastion de l'est de Bagdad, Sadr City, le calme revenu lundi matin tenait encore 24 heures plus tard, après une nuit meurtrière au cours de laquelle 13 manifestants ont péri dans des affrontements avec l'armée. Cette dernière avait reconnu lundi "un usage excessif de la force" et annoncé avoir "commencé à demander des comptes aux officiers" ayant commis des "erreurs".
Des vidéos ont montré des manifestants se mettre à couvert sous des rafales ininterrompues de tirs, parfois à l'arme lourde. Plus d'images pourraient bientôt être révélées alors que le réseau internet --coupé progressivement à Bagdad et dans le sud depuis mercredi soir-- recommence à marcher par saccades.
Les réseaux sociaux, où les manifestants disent vouloir poster leurs images de violence des forces de l'ordre, sont toutefois toujours inaccessibles.
A l'exception de dimanche soir à Sadr City, les autorités irakiennes ont jusqu'à présent assuré s'en tenir aux "standards internationaux". Ils accusent des "tireurs non identifiés" de viser manifestants et forces de l'ordre. Les défenseurs des droits humains accusent eux les forces de l'ordre d'avoir tiré sur les manifestants.
"Le fait que les forces de sécurité admettent avoir utilisé une force excessive est un premier pas qui doit se traduire sur le terrain, afin de brider" leur action et celle de l'armée, a estimé Amnesty International. "La prochaine étape est de faire rendre des comptes", a prévenu l'ONG des droits humains.
Pèlerinage
Avant que les violences ne connaissent un répit, une autre force armée avait fait son entrée dans le mouvement: le Hachd al-Chaabi, puissante coalition paramilitaire dominée par des milices chiites proches de l'Iran et désormais en grande partie intégrée à l'Etat.
Son chef Faleh al-Fayyadh s'est dit "prêt" à intervenir pour empêcher "un coup d'Etat ou une rébellion", si le gouvernement le lui ordonnait.
Les violences de la semaine écoulée qui ont touché Bagdad et le sud chiite se déroulent à moins de deux semaines du plus grand pèlerinage chiite.
Pour l'Arbaïn, qui célèbre la fin du deuil pour le "martyre" de l'imam Hussein, figure fondatrice de l'islam chiite, des millions de pèlerins, venus d'Irak et d'Iran principalement, convergent à pied vers le tombeau de l'imam Hussein à Kerbala, au sud de Bagdad.
Lundi, M. Abdel Mahdi a multiplié les contacts diplomatiques, discutant au téléphone avec le secrétaire d'Etat américain Mike Pompeo et recevant le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov pour une visite qui était prévue avant le début de la contestation et a été maintenue.
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