A l'issue d'un comité exécutif très attendu à Tokyo, après de premières fuites durant le week-end, l'AMA a confirmé avoir ouvert une "procédure formelle de conformité à l'encontre de Rusada (l'agence russe antidopage), le 17 septembre dernier".
En cause, des "incohérences" constatées dans les données électroniques des contrôles de l'ancien laboratoire de Moscou. Ces données, remises par la Russie au début de l'année, avaient justement permis de sortir de la crise provoquée par le vaste scandale sur un système de dopage institutionnel ayant sévi dans le pays entre 2011 et 2015.
L'AMA enquête depuis près de cinq ans sur ce système, et les fraudes déjà établies, notamment par les deux tomes du rapport du juriste canadien Richard McLaren, ont conduit à bannir le drapeau et l'hymne russes des Jeux olympiques d'hiver 2018 à Pyeongchang, ainsi que de toute compétition internationale d'athlétisme depuis novembre 2015, JO de Rio inclus. Seules des sélections de sportifs russes "neutres" y ont été admis.
Les enquêteurs de l'AMA considèrent les données brutes des contrôles antidopage récupérées dans les serveurs russes comme une pièce du puzzle devant permettre de lever le voile sur ce qui se passait réellement dans le labo, où les résultats de centaines de contrôles auraient été blanchis. Car l'AMA dispose aussi d'autres éléments extraits du labo, que lui ont fournis des lanceurs d'alerte.
Tokyo à l'horizon
"Des experts ont examiné (les données) que nous avons obtenues de lanceurs d'alerte, et ce que nous avons obtenu de la Russie. Ils ont remarqué certaines incohérences, puis ils ont étudié les différences, ce qui amène à une situation où il y a des questions qui doivent être posées", a expliqué à l'AFP le directeur général de l'AMA, Olivier Niggli, à l'issue du comité exécutif de l'agence dans la capitale japonaise.
"Nous avons appris que les données transmises à l'AMA par un informateur sont quelque peu différentes de la copie que les experts de l'AMA ont obtenue de Moscou en 2019", a confirmé le ministre russe des Sports, Pavel Kolobkov, dans un communiqué.
"Des experts des deux côtés, déjà en contact, vont voir à quoi sont dus ces écart. Nous continuons d'aider par tous les moyens possibles", a-t-il ajouté.
Concrètement, l'AMA va chercher à déterminer si la Russie a fourni des données trafiquées, pour mettre à l'abri des sportifs de toute poursuite disciplinaire. Car depuis qu'elle a récupéré les données brutes des contrôles, censées établir avec certitude les produits dopants et leur concentration dans les échantillons à l'époque, avant toute intervention humaine, l'AMA a pu transmettre des dizaines de cas aux fédérations.
"Il y a d'ores et déjà 47 dossiers qui se poursuivent, qui ne sont absolument pas affectés" par les anomalies confirmées lundi, a détaillé Olivier Niggli. "Il y en aura d'autres", a-t-il promis, tout en concédant que les incohérences constatées dans les données remises par Moscou "pourraient affecter certains dossiers".
L'AMA avait déclaré Rusada non-conforme au code mondial antidopage en novembre 2015, mais malgré de nouvelles révélations sur l'ampleur du scandale peu avant les JO de Rio-2016, ses appels à bannir la Russie n'avaient pas été entendus par le Comité international olympique (CIO), qui avait laissé le soin de trancher aux fédérations sportives. Or, seule la fédération internationale d'athlétisme avait levé un drapeau rouge.
Désormais, l'AMA dispose de nouveaux pouvoirs qui peuvent la conduire, en dernier recours, à bannir un pays de participation aux Jeux olympiques. Mais ces sanctions seraient, in fine, examinées et confirmées ou non par le Tribunal arbitral du sport (TAS) à Lausanne. Les Jeux olympiques de Tokyo sont prévus du 24 juillet au 9 août 2020.
De nouvelles sanctions ? "Il est trop tôt" pour se prononcer, a mis en garde Olivier Niggli, confirmant que le dernier mot reviendra au TAS.
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