Désireux de ne pas brusquer les Français et de provoquer une nouvelle étincelle, après avoir difficilement calmé la crise des "gilets jaunes", Edouard Philippe entend "expliquer" et "rassurer" jeudi sur les ambitions du gouvernement en matière de retraites, alors se profilent plusieurs journées de mobilisation contre cette réforme.
Après la remise mi-juillet du rapport du haut-commissaire Jean-Paul Delevoye, qui sert de base de discussions, puis la réception la semaine dernière des partenaires sociaux pour déminer le terrain, M. Philippe a choisi jeudi une stratégie en deux temps pour faire passer ses messages.
Il prononcera d'abord un discours devant le Conseil économique, social et environnemental (CESE), c'est-à-dire l'assemblée des corps intermédiaires (patronat, syndicats, associations...). Une strate de la société qui s'était sentie malmenée et avec laquelle l'exécutif entend renouer dans le cadre de l'acte 2 du quinquennat.
Emmanuel Macron a d'ailleurs pris soin de recevoir lundi à l'Elysée le patron de la CFDT Laurent Berger - devenu l'interlocuteur privilégié parmi les partenaires sociaux - avant de s'entretenir avec Laurent Escure (UNSA) jeudi matin.
"L'esprit est celui qui prévaut depuis le début de l'acte 2: ouverture et dialogue", fait-on valoir à Matignon où l'on affirme que "le choix du lieu n'est pas anodin".
"C'est un signal pour montrer que ce n'est pas uniquement à Matignon que la future loi sera réfléchie et écrite", assure-t-on encore.
Edouard Philippe interviendra ensuite à 20H00 au journal télévisé de TF1 afin de s'adresser "à tous les Français" pour "rassurer, expliquer l'ambition de réforme", "faire de la pédagogie" sur un sujet "qui parle à tous et qui est aussi extrêmement compliqué", explique-t-on dans l'entourage du Premier ministre.
Le Premier ministre devra notamment éclaircir le point concernant l'âge de départ à la retraite, après un cafouillage à la tête de l'exécutif.
Appels à la grève
Le rapport de M. Delevoye préconise une borne à 64 ans pour bénéficier d'une retraite à taux plein. Mais M. Macron a indiqué fin août, à la surprise générale, sa préférence pour une modulation selon la durée de cotisation, plutôt que l'âge.
Sur le calendrier, Edouard Philippe estime que 2020 est "le bon moment" pour traiter ce dossier, une promesse de campagne d'Emmanuel Macron, qui vise à fusionner en un système unique par points les 42 régimes existants, à l'horizon 2025.
Plusieurs questions sont en suspens: à quelle échéance le projet de loi sera rédigé, présenté en conseil des ministres, examiné au Parlement et voté ? A quel rythme et jusqu'à quelle date butoir la transition, infiniment complexe, entre les anciens et le nouveau système s'effectuera ?
Dans le sillage du grand débat national, l'exécutif a aussi promis des "consultations citoyennes", espérant ainsi impliquer les Français dans la réforme.
La durée de cette concertation n'a pas encore été fixée, même si le ministre des Comptes publics Gérald Darmanin a évoqué une phase "d'un an". Il semble peu probable que le projet de loi soit dévoilé avant les élections municipales de mars 2020, même si l'Unsa comme le Medef et le CPME ont exprimé leur souhait de voir le dossier aboutir au plus tôt en 2020.
Quant à la forme de ces consultations, au pilotage, et à la prise en compte de leurs conclusions, ils restent bien flous. Mais il n'était pas certain que M. Philippe offre davantage de précisions jeudi.
Ces annonces précèdent des journées d'appel à la grève en ordre dispersé.
Le vendredi noir attendu dans les transports parisiens sera suivi lundi, à l'initiative du Conseil national des barreaux, des avocats, pilotes de ligne, stewards et hôtesses, mais aussi quelques infirmiers et médecins, d'une manifestation à Paris pour défendre leurs régimes.
Force ouvrière prévoit pour sa part un rassemblement le 21 septembre à Paris, quand la CGT, Solidaires et Sud-Rail défileront ensemble le 24 septembre.
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