Les tribunaux russes ont soufflé le chaud et froid tout au long de la journée mardi, à moins d'une semaine d'élections locales et régionales controversées, pour lesquelles l'exclusion des candidats d'opposition a provoqué le plus important mouvement de contestation depuis le retour de Vladimir Poutine au Kremlin en 2012.
Le blogueur Vladislav Sinitsa a ainsi été condamné à cinq ans de prison pour "incitation à la haine" pour un tweet dans lequel il suggérait de s'en prendre aux enfants des policiers après la répression d'une manifestation.
Deux des manifestants, Ivan Podkopaïev et Danila Beglets, se sont pour leur part vu infliger respectivement trois et deux ans de prison pour "violences" : l'un pour avoir aspergé de gaz lacrymogène des policiers, l'autre pour avoir violenté l'un d'entre eux. Les deux hommes avaient plaidé coupable.
Une dizaine d'autres personnes accusées de "troubles massifs" ou de "violences à l'encontre des forces de l'ordre" doivent encore comparaître devant la justice.
Dans un recul surprise, les enquêteurs ont parallèlement allégé les graves accusations portées contre cinq autres personnes, en les requalifiant en violations administratives, passibles d'amendes ou de courtes peines de prison.
Plusieurs meneurs de l'opposition dont un journaliste réputé encourent également des amendes ou de courtes peines de prison pour l'organisation des dernières manifestations en date, qui visent à protester contre l'éviction des candidats indépendants à l'élection du Parlement de Moscou, prévue pour le 8 septembre.
Parmi les cinq personnes voyant les accusations portées contre elles allégées figure Daniil Konon, qui fait des études d'ingénieur au prestigieux institut Bauman de Moscou, un ancien cadet de l'armée ayant participé à des défilés sur la place Rouge.
Les autre accusés sont Valeri Kostenko, un membre du parti d'opposition Iabloko, le réalisateur Dmitri Vassiliev, le militant Vladislav Barabanov et Sergueï Abanitchev, accusé d'avoir jeté une canette sur un policier.
"Vengeance"
Les procès visant l'opposition et ses partisans se sont multipliés ces deux derniers mois dans un contexte de répression du plus important mouvement de contestation depuis le retour de Vladimir Poutine au Kremlin en 2012.
Arrêté lundi soir, Ilia Azar, un journaliste du média d'opposition Novaïa Gazeta, encourt jusqu'à 30 jours de prison pour avoir été l'un des meneurs du mouvement.
Devant à l'origine comparaître devant un juge mardi, le journaliste a déclaré que le tribunal avait renvoyé son affaire au 23 septembre en raison d'"erreurs" dans les documents présentés par la police.
"Il s'agit tout simplement d'une vengeance basse et démonstrative parce que nous ne voulons pas renoncer à nos droits", a réagi sur Twitter le principal opposant au Kremlin, Alexeï Navalny, qui a récemment retrouvé la liberté après 30 jours de prison.
Autres meneurs du mouvement de protestation, la jeune avocate Lioubov Sobol et le militant Nikolaï Liaskine ont également été arrêtés lundi soir par la police.
Les trois opposants, accusés d'avoir organisé des manifestations sans avoir obtenu l'aval des autorités, ce qu'exige la loi, ont été relâchés peu après mais Lioubov Sobol doit se présenter en principe devant un tribunal mardi. La jeune femme a dit à l'AFP ne pas avoir l'intention de s'y rendre.
Condamnations à répétition
Des manifestations ont eu lieu quasiment chaque week-end à Moscou depuis la mi-juillet pour protester contre l'éviction des candidats de l'opposition. Pour la plupart non autorisées, elles ont donné lieu à près de 2.700 arrestations.
La plupart des meneurs de l'opposition ont enchaîné de courtes peines de prison, à l'exemple d'Ilia Iachine, emprisonné pour la cinquième fois consécutive mercredi.
L'organisation de M. Navalny, le Fonds de lutte contre la corruption, est pour sa part visé par une enquête pour "blanchiment".
Le scrutin de dimanche à Moscou et les autres élections régionales et locales qui se dérouleront s'annoncent difficiles pour les candidats du pouvoir, dans un contexte de grogne sociale et de stagnation économique.
Selon un récent sondage du centre Levada, près d'un quart des Russes sont prêts à participer à des actions de protestation. Si environ la moitié des sondés se disent indifférents aux manifestations dans la capitale russe, ils sont 41% à considérer que la police a fait un usage excessif de la force.
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