Hasan Kale a choisi son nom d'artiste en hommage au maître de la Renaissance Michel-Ange. Parmi ses créations les plus connues figurent une scène du film "Pulp Fiction" peinte sur un popcorn ou encore un portrait du fondateur de la Turquie moderne, Mustafa Kemal, sur un grain de riz.
Pour contempler ces concentrés de minutie, il faut bien souvent s'équiper d'une loupe, même si l'artiste lui-même explique peindre à l'oeil nu, uniquement équipé de lunettes de vue prescrites par son médecin et non de lunettes grossissantes... ou d'un microscope.
"Je me suis lancé dans cette aventure il y a 25 ans avec pour objectif de créer une nouvelle forme d'expression artistique", explique le fringant sexagénaire à l'AFP qu'il reçoit dans son atelier à Istanbul.
Cette quête, il la poursuit en "transformant en petites capsules d'art des objets que nous mettons de côté ou considérons comme des déchets".
A grand renfort de discipline et de patience: "Je peux travailler sur un seul objet pendant six mois", explique l'artiste, en y consacrant jusqu'à 18 heures par jour.
Istanbul sur un haricot
Cet autodidacte a commencé à faire des recherches sur l'art miniature il y a une trentaine d'années, fasciné par le fait qu'une "minuscule touche peut changer une forme d'expression artistique", explique-t-il.
Et c'est en 1995 que l'idée d'exploiter des objets peu conventionnels lui est venue.
Le déclic s'est produit en regardant une tasse de café vide et en remarquant que le marc de café pouvait prendre des formes gracieuses et élaborées, en dépit de l'espace réduit, raconte-t-il.
"J'ai commencé à travailler sur un haricot. Je me suis assis et j'ai gravé un paysage d'Istanbul dessus. Ca m'a tellement plu que j'ai testé d'autres objets."
Depuis, Hasan Kale a travaillé sur 300 surfaces. Il se réjouit à l'idée qu'un objet anodin, comme un galet dans la mer ou une arête de poisson qui se coince entre les dents, peut se transformer en oeuvre d'art.
"Imaginez le bruit que font les centaines de pépins lorsque vous mordez dans une figue. Maintenant, pouvez-vous visualiser un paysage d'Istanbul sur l'un d'entre eux ?", demande-t-il.
L'exemple n'est pas anodin car Istanbul, tentaculaire capitale économique et culturelle de la Turquie, est la principale source d'inspiration de Kale. Il a peint la ville sur des dés, des morceaux de sucre et des graines de tournesol.
"C'est l'une de ces rares villes qui ne dorment jamais. Elle est à cheval sur deux continents et on y trouve les traces de nombreuses cultures", souligne-t-il.
Héritier des enlumineurs
C'est aussi à Istanbul que les lointains prédécesseurs de Kale se sont frottés à l'art miniature. Ainsi, "Micro-Angelo" a appris de nombreuses techniques en étudiant le travail de Nakkach Osman, un célèbre peintre enlumineur ottoman du XVIe siècle qui apparaît dans un roman d'Orhan Pamuk, "Mon nom est Rouge".
Aujourd'hui comme il y a 400 ans, l'art de la miniature est un travail qui peut mettre les nerfs à rude épreuve.
"Il faut avant tout avoir beaucoup de patience (...) Et ne pas s'attendre à faire fortune", indique Kale, qui dessine par ailleurs des bijoux.
Ses oeuvres miniatures, qu'il expose sur les réseaux sociaux comme Instagram, ont attiré l'attention de nombreux curieux à travers le monde. Et bien qu'elles ne puissent pas être mises en valeur comme un tableau en raison de leur taille, Kale affirme en avoir vendu certaines pour plusieurs milliers d'euros.
Leur taille réduite permet à l'artiste de travailler sur ses créations n'importe où, n'importe quand. Il lui est ainsi arrivé de le faire en attendant son avion, ou à bord d'une montgolfière, dit-il.
"Il m'arrive d'avoir une idée pendant que je marche dans la rue. Alors je m'assieds et (...) sors ma palette pour peindre."
L'artiste dit aimer que les gens se souviennent de ses oeuvres dans les moments les plus simples de leur vie: "en mangeant du popcorn au cinéma ou en buvant une tasse de café..."
"L'art miniature, c'est ma vie", sourit-il. "C'est indispensable pour moi".
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