"Nous annonçons au monde qu'a commencé le seconde Marquetalia (berceau de la rébellion marxiste en 1964, ndlr) au nom du droit universel des peuples à se lever en armes face à l'oppression", affirme l'ex-numéro deux des Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc), Ivan Marquez dans cette vidéo de 32 minutes.
Il y apparaît avec d'autres anciens chefs rebelles, également entrés dans la clandestinité depuis plusieurs mois.
Le gouvernement du président de droite dure Ivan Duque, qui a tenté de modifier l'accord qu'il estime trop laxiste envers les anciens guérilleros, a jugé l'annonce "très préoccupante", mais pas surprenante.
"Il n'y a aucune surprise pour le gouvernement. Malheureusement, ces personnes avaient, par leur comportement, déjà clairement exprimé qu'elles tournaient le dos à l'accord de paix", a déclaré le haut commissaire de paix du gouvernement, Miguel Ceballos.
De la jungle du sud-est de la Colombie, Ivan Marquez annonce "la poursuite des opérations de guérilla en réponse à la trahison par l'Etat des accords de paix de la Havane" qui ont permis le désarmement en 2017 de quelque 7.000 combattants des Farc, transformées en parti politique.
Rapprochement avec l'ELN
Le commandant Marquez avait été le chef de la délégation rebelle aux négociations de paix menées pendant quatre ans à Cuba avec le gouvernement du président centriste de Juan Manuel Santos (2010-2018).
A ses côtés apparaissent armés un autre négociateur, Jesus Santrich, recherché par la justice pour trafic de drogue présumé et passé à la clandestinité il y a trois mois, ainsi que l'ex-commandant Hernan Dario Velasquez, alias El Paisa.
Ils sont entourés par 17 hommes et femmes munis de fusils, devant une pancarte affichant le sigle Farc-EP (Forces armées révolutionnaires de Colombie - Armée du peuple).
"La fourberie, la duplicité et la perfidie, la modification unilatérale du texte de l'accord, la non application de ses engagements de la part de l'Etat, les montages judiciaires et l'insécurité nous obligent à reprendre le maquis", ajoute Ivan Marquez.
"Nous n'avons jamais été vaincus, ni défaits idéologiquement, c'est pour cela que la lutte continue", lance-t-il, précisant que le nouveau groupe cherchera à cordonner ses "efforts avec la guérilla de l'ELN et avec ces camarades qui n'ont pas replié leurs drapeaux".
L'Armée de libération nationale (ELN), considérée comme la dernière guérilla active de Colombie, s'est renforcée ces dernières années, passant de 1.800 à environ 2.300 combattants, selon les autorités.
Des pourparlers de paix, entamés en 2017, ont été enterrés par le gouvernement de l'actuel président de droite dure Ivan Duque, suite notamment à un attentat contre l'école de police de Bogota revendiqué par l'ELN et qui a fait 22 morts en janvier dernier.
Les groupes dissidents des Farc comptent aussi quelque 2.300 combattants armés, qui se dédient surtout au narco-trafic et à l'exploitation minière clandestine, selon les services de renseignement militaires.
"Coup bas" selon la Farc
Après la signature de la paix, les Farc s'étaient transformées en parti politique sous le nom de Force alternative révolutionnaire commune. Mais des centaines d'anciens rebelles se sont marginalisés du processus visant à mettre fin à plus d'un demi-siècle d'une guerre fratricide.
Ivan Marquez, désigné comme parlementaire Farc, a pris ses distances il y a plus d'un an, reprochant déjà à l'Etat de ne pas respecter ses engagements.
Jesus Santrich, soupçonné de trafic de drogue et accusé par les Etats-Unis de complot pour l'expédition de cocaïne après l'accord de paix, fait l'objet d'un mandat d'arrêt international.
Comme El Paisa, ils sont requis par la juridiction spéciale de paix (JEP), chargée de juger les crimes commis durant la confrontation armée et qui peut décider de peines alternatives à la prison.
Le chef du parti Farc, Rodrigo Londoño, alias Timochenko, a pour sa part dénoncé un "coup bas", mais estimé que "la grande majorité des gens restent dans le processus" de paix.
Dans le même sens, l'ex-président Santos a estimé sur Twitter que "90% des Farc restent dans le processus de paix" et appelé à "réprimer les déserteurs".
"Ils vont rassembler d'autres ex-combattants insatisfaits du processus (...) Cela peut s'intensifier s'ils parviennent à une unité avec l'ELN", a déclaré à l'AFP le politologue Dario Villamizar, prévoyant "une offensive militaire" de l'Etat comme "il n'en pas menée jusqu'ici contre les dissidences" Farc.
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