Si le cinéma ne lui a pas donné de rôles de jeune premier, l'acteur, décédé mercredi à 82 ans, a été un géant du théâtre à partir des années 60, incarnant à merveille l'Avare de Molière pendant 20 ans au sein de la Comédie-Française dont il était sociétaire honoraire depuis 1994. Il a notamment vu débuter Isabelle Adjani sur les planches.
Le sourire un peu las, l'oeil tout en finesse, cet homme modeste et plein d'humour, doté d'une "gueule", est tombé amoureux de la scène en suivant dès son plus jeune âge au Festival d'Avignon sa mère comédienne, Hélène Gerber, jouant des rôles d'enfant dans de petits spectacles.
Né le 15 octobre 1936 à Paris, il entre à 18 ans au Conservatoire national d'art dramatique et obtient deux ans plus tard un premier prix de comédie moderne avant d'être engagé à la Comédie-Française.
Policier ou politicien
"Michel Aumont appartient à la confrérie des comédiens de l'inconfort, prêts et aptes à interpréter les emplois les plus exigeants de l'entre-deux, tout à la fois déchirant ou goguenard, naturel ou composé, inquiétant ou amusant", peut-on lire dans la fiche dédiée à l'acteur sur le site de la "maison de Molière".
Sur grand écran comme sur scène, il sait laisser filtrer des émotions contradictoires et donne une touche profondément humaine à ses personnages.
Au cinéma surtout, il joue une cascade de seconds rôles, souvent comme commissaire de police, homme de loi ou politicien.
"Le maintien, l'intonation, le phrasé, la justesse, l'ironie discrète jamais bien loin et cette sorte d'épaisseur humaine qui sert les grands rôles. Un de ses titres lui va bien : L'oeil du maître", a réagi l'ex-président du Festival de Cannes Gilles Jacob après l'annonce de sa mort.
Récompensé de plusieurs Molières, son plus beau souvenir sur scène est "Richard III", à Avignon en 1972, où il triomphe en reprenant le rôle tenu par Robert Hirsch, "mon plus beau souvenir et ma plus grande peur", dira-t-il.
Il joue tout, de Shakespeare à Woody Allen, en passant par Feydeau et Beckett et les plus grands metteurs en scène le demandent : Jean-Paul Roussillon, Antoine Vitez, Jean-Pierre Vincent, etc.
"L'aisance des grands"
Le ministre de la Culture Franck Riester a salué "un acteur populaire qui avait su conquérir le cœur des Français, passant du théâtre au cinéma avec cette générosité discrète qui emplissait chacun de ses rôles (...), il avait l'aisance des grands".
Il tourne pour la télévision ("Les dames de la côte") et se lancera à 35 ans dans le cinéma, avec "La Femme en bleu" (1973) de Michel Deville, "Nada" de Claude Chabrol (1974), "Des enfants gâtés" (1977) et "Un dimanche à la campagne" (1984) de Bertrand Tavernier ou encore "Edith et Marcel" de Claude Lelouch (1983).
Il exprime sa fibre comique en jouant dans la saga des "Ripoux", devant la caméra de Francis Veber ("Le Placard", 2001), "La Doublure", (2006) et en chef de protocole dans "Palais Royal !" (2005) de Valérie Lemercier.
Il reconnaît, dans une interview au Parisien en 2002, avoir eu des problèmes avec l'alcool : "c'est tellement bon cette saleté-là ! Heureusement, j'ai tout arrêté il y a quinze ans".
Son principal trait de caractère est "la naïveté", confiait-il à l'Express, avouant souffrir d'un manque de confiance en lui "confinant à la lâcheté". Il ajoutait : "je ne suis pas devenu une star, hein ! Mais à mon petit niveau, j'ai plutôt réussi".
Il était marié et père d'une fille.
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