Mis sous pression par les organisations environnementales locales, le dirigeant de gauche a finalement accepté dimanche les offres d'aide de plusieurs pays de la région et de l'Espagne pour combattre les incendies incontrôlés qui ravagent depuis plusieurs semaines le Pantanal bolivien (est), aux confins du Brésil et du Paraguay.
M. Morales a également annoncé la suspension temporaire de sa campagne électorale, alors qu'il brigue fin octobre un quatrième mandat contesté. Selon des chiffres officiels, 950.000 hectares ont été ravagés par les flammes dans l'est du pays depuis mai, avec une très forte recrudescence depuis mi-août.
Au coeur des critiques des organisations écologistes, le "chaqueo", pratique de la culture sur brûlis largement répandue et ouvertement encouragée, selon elles, par le gouvernement qui soutient l'extension des activités agricoles intensives.
"Nous parlons d'une politique d'Etat convenue avec le secteur des affaires de l'est de la Bolivie pour étendre la frontière (...) à l'agriculture intensive, au soja génétiquement modifié, aux plantations de canne à sucre et à l'habilitation des pâturages pour l'élevage du bétail", dénonce Leonardo Tamburini, directeur de l'ONG Cejis.
Les écologistes pointent du doigt une loi de 2016 qui élargit les surfaces de déboisement autorisées de 5 hectares à 20 hectares et un décret datant de juillet qui permet des incendies sous contrôle pour déforester.
"Le fait même d'autoriser des incendies contrôlés est une attaque contre les droits de la Terre-Mère et des citoyens en général, car cela affecte l'écosystème et l'environnement dans lequel nous nous développons tous", a dénoncé Unitas, un réseau d'ONG sociales.
La faute à la sécheresse
Leonardo Tamburini relève que le gouvernement d'Evo Morales va à l'encontre de ce qu'a longtemps représenté le chef de l'Etat bolivien : un Indien aymara, grand défenseur de la nature et un des promoteurs de la "Déclaration universelle des droits de la Terre-Mère", établie à l'initiative des peuples amérindiens qui militent pour qu'elle soit adoptée par l'Assemblée des Nations unies.
"Le gouvernement a perdu le cap par rapport aux principes philosophiques et idéologiques qui l'ont amené au pouvoir en 2006 et il a désormais pour base un modèle de développement extractiviste" d'exploitation massive des ressources naturelles, souligne-t-il.
"L'Etat bolivien a démontré le peu d'importance qu'il porte à la Terre-Mère au moment de décider et d'appliquer les politiques publiques, se concentrant sur la satisfaction d'intérêts qui vont contre l'utilisation durables des ressources naturelles", dénonce Unitas.
Ces dernières années, la Bolivie a multiplié les accords d'investissement internationaux, notamment avec la Chine, pour l'exploitation du gaz naturel et surtout du lithium, dont elle espère être le quatrième producteur mondial d'ici 2021.
Les organisations écologistes dénoncent également une minimisation des conséquences des incendies. La Fondation des Amis de la nature (FAN) accuse le gouvernement de ne pas prendre en compte dans les chiffres officiels la situation dans l'autre département amazonien de Beni (nord).
"La superficie brûlée au 20 août est d'environ 1,5 million d'hectares sur l'ensemble du territoire national", estime l'organisation.
Au moment où le président d'extrême droite brésilien Jair Bolsonaro, climato-sceptique assumé, est sous pression internationale pour sa gestion des incendies dans l'Amazonie brésilienne, le gouvernement d'Evo Morales met en cause la sécheresse comme cause principale des feux.
"Le problème principal c'est la sécheresse. Nous savions depuis l'été (austral) qu'il y avait un déficit hydrique. Les feux sont provoqués par la sécheresse, c'est totalement confirmé, outre les vents de ces derniers jours qui ont propagé les flammes", a déclaré le ministre de l'Agriculture et des Terres, César Cocarico.
Le président Morales, réélu en 2009, puis en 2014 et qui a obtenu de la Cour constitutionnelle la possibilité de se présenter sans limitation de mandat, a également répondu aux critiques : "Il y a des inondations, c'est la faute d'Evo Morales ; il y a la sécheresse, c'est la faute d'Evo Morales ; il y a des incendies, c'est la faute d'Evo Morales".
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