"Les actions barbantes n'intéressent personne. On a besoin d'originalité pour attirer l'attention des médias occidentaux", déclare Dennis Wong, un programmeur de 25 ans en train de discuter en ligne avec d'autres protestataires.
Si les mouvements sociaux en Occident consistent souvent en de classiques manifestations ou sit-in, les Hongkongais ont une boîte à outil sensiblement plus fournie.
"On s'inspire en partie de ce qui a été fait dans les pays de l'ex-bloc socialiste en Europe, ou par les étudiants de la place Tiananmen de Pékin en 1989", explique M. Wong avant de crier en cantonais "Ga Yau!" ("Courage!"), le cri de ralliement des protestataires.
Leur dernière grosse action en date: une chaîne humaine de milliers de personnes, qui a serpenté vendredi soir sur des kilomètres dans les rues de l'ex-colonie britannique, rétrocédée à la Chine en 1997.
Née du rejet d'un projet de loi -- désormais retiré -- visant à autoriser les extraditions vers la Chine continentale, la contestation a depuis mué en une campagne plus globale exigeant davantage de démocratie et la protection des libertés locales.
La ville semi-autonome avait déjà connu un important mouvement social en 2014. Surnommé "la Révolution des parapluies", il avait exigé en vain le suffrage universel complet pour l'élection du chef de l'exécutif local.
'C'est unique'
"C'était très créatif en terme d'art, de graphisme, ou de mèmes. Mais pas en matière d'actions de protestation, car le but à l'époque c'était surtout l'occupation (du quartier d'affaires) de Central", note Antony Dapiran, auteur d'un ouvrage sur les mouvements sociaux hongkongais.
"En revanche, la créativité et l'innovation déployées (cette année) dans l'élaboration des moyens de contestation, c'est unique et sans pareil."
Ainsi la mobilisation de l'aéroport de Hong Kong mi-août, où pendant plusieurs jours, une foule de manifestants ont accueilli les visiteurs tout juste débarqués de leur avion, leur distribuant sourire aux lèvres des tracts expliquant leurs revendications.
Autre moyen d'action original: des protestataires ont financé des pleines pages de publicité expliquant leur mouvement dans 11 journaux étrangers dont Le Monde (France), le New York Times (Etats-Unis) ou le Frankfurter Allgemeine (Allemagne).
"En 2014, le gouvernement ne nous a pas écouté, et on avait perdu. On a alors compris qu'un grand rassemblement statique, ça ne fonctionnait pas à Hong Kong", déclare Esther Lau, une étudiante en diplomatie de 22 ans participant à la chaîne humaine.
"On s'est donc dirigé vers d'autres moyens, plus créatifs, pour ne pas lasser les gens. Le but, c'est aussi de séduire les Hongkongais plus modérés et pro-gouvernement, les pousser à nous rejoindre", raconte-t-elle masque sur le visage afin d'éviter d'être identifiée par la police.
Telegram et hélicoptère
Beaucoup de Hongkongais ont également collé depuis juin, sur les murs des passerelles piétonnes qui enjambent les avenues, des milliers de post-it multicolores avec des messages de colère ou d'encouragement.
Objets fétiches des manifestants, les lasers ont également été mis à contribution pour organiser de nuit devant l'immense dôme du Musée de l'espace un très visuel spectacle lumineux digne d'une rave party.
"Il n'y a pas de leader. Tout le monde peut proposer une idée sur les forums internet ou sur l'application de messagerie Telegram", explique Sze Man, étudiante de 21 ans.
"Si les gens trouvent ça bien, alors ils commencent à en discuter, et affinent, améliorent progressivement l'idée de départ. Puis ça s'organise."
Sur certains forums, des militants réfléchissent déjà à de nouveaux moyens d'action.
"Certains parlent de l'idée un peu folle de louer un hélicoptère, sur lequel on accrocherait une banderole", explique Esther Lau.
"On le ferait voler le jour de la fête nationale chinoise le 1er octobre, pour perturber les cérémonies officielles pro-Pékin qui ont lieu tous les ans à Hong Kong."
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