Dans un communiqué diffusé à l'improviste peu avant 18H00 GMT, M. Salvini, vice-Premier ministre de M. Conte, a exigé une convocation immédiate "du Parlement pour prendre acte qu'il n'y a plus de majorité". "Restituons rapidement la parole aux électeurs", a-t-il lancé, après avoir eu deux longues discussions avec M. Conte entre mercredi et jeudi.
Dans la soirée, le "capitaine" a de facto lancé sa campagne électorale lors d'un meeting à Pescara (centre-est). "On nous dit qu'on ne peut pas réduire les impôts. Nous prouverons, si vous nous donnez la force de le faire, qu'il est possible de réduire les impôts aux travailleurs italiens", a-t-il lancé devant des sympathisants en liesse.
Il a aussi dénoncé les multiples "non" essuyés de la part de ministres M5S sur l'avancée des grands chantiers, la réforme de la justice, l'autonomie des régions etc...
Ces attaques ont provoqué la colère de son ex-allié Luigi Di Maio, chef du M5S, également vice-Premier ministre, ainsi que de M. Conte, proche du mouvement. "Ce n'est pas du ressort du ministre de l'Intérieur de convoquer le parlement, ce n'est pas à lui de dicter les étapes de la crise politique", a critiqué M. Conte.
Le chef du gouvernement a intimé à M. Salvini de "venir expliquer aux électeurs qui croyaient à la possibilité d'un changement les raisons qui l'ont amené à interrompre brutalement", l'expérience du gouvernement, alors que la Ligue a obtenu pratiquement tout ce qu'elle voulait. "Ce gouvernement en réalité a toujours parlé peu et travaillé beaucoup. Ce gouvernement n'était pas à la plage", a souligné M. Conte, dans une allusion à une tournée des plages lancée mercredi par Salvini.
La crise au sein de la coalition a été déclenchée par le dernier vote de la session parlementaire sur la ligne ferroviaire Lyon-Turin, mercredi.
Le M5S s'est retrouvé à voter tout seul une motion contre cette liaison franco-italienne à grande vitesse, tandis que la Ligue apportait son soutien à deux motions de l'opposition en faveur du projet.
La Ligue en position de force
Les crises politiques en Italie ne se produisent généralement pas en été, encore moins en plein mois d'août, mais Matteo Salvini a estimé que cela n'avait pas d'importance.
"Les vacances ne peuvent pas être une excuse pour perdre du temps et les parlementaires peuvent revenir travailler la semaine prochaine, comme le font des millions d'Italiens, à moins qu'ils ne veulent sauver leurs privilèges", a estimé le chef de la Ligue dans le communiqué par lequel il a déclenché la crise.
La tension entre les deux alliés, la Ligue et le M5S, couvait depuis de longues semaines, plus spécialement depuis les élections européennes qui se sont traduites par un triomphe de la Ligue et un échec cuisant pour le Mouvement.
Ces élections ont marqué un retournement par rapport aux législatives de mars 2018 qui avaient attribué au M5S plus de 32% des voix et à la Ligue environ 17%. Aux Européennes, la Ligue a obtenu plus de 34%, le double du M5S, tombé à 17%.
Luigi di Maio, le chef du M5S très contesté en interne et peu offensif depuis les Européennes, a accusé dans la soirée Matteo Salvini de "faire passer les sondages en priorité et ses propres intérêts devant les intérêts du pays".
Selon M. Conte, M. Salvini lui a avoué vouloir "capitaliser" sur ses récents succès électoraux.
La grande inconnue reste la réaction du chef de l'Etat, M. Mattarella, qui a seul le pouvoir de dissoudre le Parlement, après consultation des présidents des deux chambres et des principaux dirigeants politiques avant de convoquer un scrutin.
Or M. Mattarella est notoirement opposé à des élections à l'automne, la période où le gouvernement doit préparer le budget de l'année prochaine, en discuter avec Bruxelles et le présenter pour adoption au Parlement.
Selon l'agence AGI, le Sénat pourrait se réunir le 20 août pour décréter la fin de la majorité gouvernementale et le Parlement pourrait être dissous quelques jours plus tard. De nouvelles élections devraient alors être convoquées dans un délai de 50 à 70 jours, selon la Constitution italienne.
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