La mégapole du sud de la Chine, qui traverse sa plus grave crise politique depuis sa rétrocession en 1997 par Londres, a déjà connu huit week-ends consécutifs de manifestations massives, souvent suivies d'affrontements entre de petits groupes radicaux et les forces de l'ordre.
Samedi soir, c'est le quartier de Tsim Sha Tsui, secteur à la pointe Sud de Kowloon juste en face de l'île Hong Kong, qui a été le théâtre d'échauffourées.
La police a lancé plusieurs salves de gaz lacrymogène devant un commissariat, repoussant les manifestants dans des rues habituellement fréquentées par badauds et touristes envahissant ses centres commerciaux.
Dimanche après-midi, deux défilés simultanés sont prévus, avant un appel à la grève générale lundi.
Une des manifestations aura pour cadre le quartier résidentiel de Tseung Kwan O (Est). La seconde doit se terminer dans un parc de l'île de Hong Kong, proche du Bureau de liaison, bâtiment qui abrite les organes du gouvernement central chinois dans l'ancienne colonie britannique.
Jets d'oeufs
Il y a deux semaines, cet immeuble proche du front de mer et voisin du siège du gouvernement local avait été la cible de jets d'oeufs par des manifestants qui avaient tagué sa façade.
Pékin, qui avait dénoncé des dégradations "absolument intolérables", multiplie depuis lors les mises en garde contre les manifestants. Cette semaine, la garnison de l'Armée populaire de libération (APL) basée à Hong Kong, a aussi lancé un avertissement au travers d'une vidéo musclée mettant en scène sa capacité d'intervention.
Les autorités locales ont également durci le ton et une quarantaine de manifestants ont été formellement inculpés mercredi pour participation à une émeute -infraction passible de dix ans de prison- pour leur implication dans les heurts du week-end dernier.
La mobilisation avait débuté début juin avec la dénonciation d'un projet de loi -aujourd'hui suspendu- qui proposait de légaliser les extraditions vers la Chine.
Les revendications se sont depuis élargies à la dénonciation du recul des libertés dans l'ex-colonie britannique ou à l'exigence de réformes démocratiques.
Initialement très pacifiques, les manifestations ont ces derniers temps de plus en plus dégénéré en affrontements avec les forces de l'ordre.
Le 21 juillet, à l'issue d'un nouveau rassemblement monstre, des manifestants avaient été brutalement agressés à Yuen Long (nord-est) par des hommes soupçonnés d'appartenir aux triades, faisant 45 blessés.
Lance-pierres
Samedi à Tsim Sha Tsui, des protestataires au visage masqué ont fracassé les vitres de voitures garées sur le parking d'un commissariat et maculé un mur de graffitis.
Des manifestants ont même utilisé un énorme lance-pierres, tenu par deux d'entre eux, pour projeter des briques sur le bâtiment.
D'autres ont élevé des barricades sur des artères d'ordinaire très empruntées et temporairement bloqué l'un des tunnels routiers permettant de rejoindre l'île de Hong Kong.
La police a annoncé l'arrestation de "plus de 20 personnes", ce qui porte le nombre total d'interpellations à plus de 200 depuis le 9 juin.
Les forces de l'ordre sont en train de battre des records d'impopularité, les policiers étant régulièrement raillés par les manifestants comme n'étant que des hommes de main de Pékin. Les autorités se défendent d'un usage excessif de la force, en affirmant être aux prises avec des manifestants très radicalisés.
Cependant, des dizaines de milliers de personnes ont aussi participé samedi dans un parc à une contre-manifestation pour soutenir l'action des forces de l'ordre. Ce rassemblement, où fleurissaient de nombreux drapeaux chinois, a été diffusé par la télévision publique chinoise.
En vertu du principe "Un pays, deux systèmes" qui avait présidé à la rétrocession, Hong Kong jouit jusqu'en 2047 de libertés inconnues dans le reste du pays. Mais de plus en plus de voix s'inquiètent de voir Pékin bafouer cet accord et accroître sa mainmise.
La colère de la population plonge aussi ses racines dans les difficultés économiques, les inégalités sociales de plus en plus fortes et le sentiment que la ville perd son identité culturelle du fait de son intégration de plus en plus forte à la Chine continentale.
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