Condamné la semaine dernière à 30 jours d'emprisonnement et incarcéré, Alexeï Navalny a été transféré à l'hôpital dimanche en raison d'une "grave réaction allergique".
Son entourage s'est aussitôt inquiété de cette réaction, "bizarre" alors que le blogueur anticorruption n'a jamais été victime de quelconques allergies, et qui intervient au lendemain d'une manifestation marquée par près de 1.400 arrestations, du jamais vu depuis le retour de Vladimir Poutine au Kremlin en 2012.
Lundi, son médecin personnel Anastasia Vassilieva a dit sur sa page Facebook suspecter que "la cause de la +maladie+" d'Alexeï Navalny soit un "certain agent toxique".
Elle a expliqué se baser sur les informations dont elle dispose sur ses symptômes, ainsi que sur l'attitude "bizarrement nerveuse" du personnel de l'hôpital, qui lui a permis de voir son patient mais pas de l'examiner.
Elle a indiqué lundi avoir finalement eu l'autorisation de l'examiner plus tard dans la journée.
Au moment de son transfert à l'hôpital, Alexeï Navalny souffrait notamment d'un gonflement des paupières, et il a de multiples abcès sur le cou, le dos, le torse et les coudes.
Interrogée par la télévision indépendante Dojd, Mme Vassilieva a indiqué avoir récupéré le t-shirt de l'opposant ainsi que des cheveux qui seront l'objet d'une "expertise indépendante" pour déterminer s'il a été empoisonné.
Contacté par l'AFP, un représentant de l'hôpital s'est contenté d'indiquer que son état était "satisfaisant" et sa température normale.
En 2017, M. Navalny avait déjà dû être soigné en Espagne d'une brûlure à l'oeil reçue après avoir été aspergé d'un colorant vert antiseptique.
Répression
L'hospitalisation d'Alexeï Navalny intervient au moment où les autorités semblent déterminées à tuer dans l'œuf toute contestation liée aux élections locales du 8 septembre, auxquelles la plupart des figures de l'opposition moscovite ont été empêchées de participer.
Un rassemblement non autorisé devant la mairie de Moscou à l'appel de ces opposants s'est soldé samedi par près de 1.400 arrestations, selon OVD-Info, spécialisée dans le suivi des manifestations. Il s'agit, selon l'ONG, du plus grand nombre d'arrestations depuis le mouvement de contestation de 2012 contre le retour au Kremlin de Vladimir Poutine.
Les Etats-Unis et l'Union européenne ont condamné ces arrestations, dénonçant l'usage "disproportionné de la force" contre les manifestants. Berlin a appelé lundi Moscou à "la libération rapide des personnes arrêtées".
Mercredi, trois jours avant ce rassemblement, Alexeï Navalny avait été renvoyé en prison pour des infractions "aux règles des manifestations".
Quant aux opposants dont la candidature avait été rejetée, parmi lesquels se trouvent plusieurs alliés de M. Navalny, ils avaient tous été perquisitionnés et convoqués la semaine dernière par la police pour répondre à des questions sur une précédente manifestation devant le siège de la Commission électorale.
L'opposition dénonce depuis plusieurs semaines le rejet des candidatures indépendantes en vue des élections locales, qui s'annoncent difficiles pour les candidats soutenant le pouvoir dans un contexte de grogne sociale.
Selon la loi, les candidats indépendants étaient censés rassembler les signatures d'au moins 3% du corps électoral dans le district où ils se présentaient. Mais la commission électorale a rejeté la candidature de toutes les figures de l'opposition ayant franchi cet obstacle, trouvant des irrégularités dans la collecte de leurs signatures.
Un premier rassemblement contre l'éviction des candidats avait réuni 2.000 manifestants le 14 juillet et la semaine dernière, un défilé autorisé avait été suivi par plus de 20.000 personnes.
Citant une source dans l'administration présidentielle, le journal en ligne russe The Bell assure que le Kremlin avait "sous-évalué" l'ampleur de la contestation. "Maintenant, il va falloir penser à quoi faire de tout ça", a déclaré cette source, suggérant que les figures de l'opposition seraient "coffrées" et le public, "intimidé".
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