Le texte, entré en vigueur pour partie et de manière provisoire il y a bientôt deux ans, suscite des réticences jusque dans la majorité LREM-MoDem, où a minima des abstentions pourraient être enregistrées.
Lundi, l'ex-ministre de la Transition écologique Nicolas Hulot a appelé dans une lettre ouverte les parlementaires à avoir "le courage de dire non" à ce traité, qui risque à ses yeux d'ouvrir la porte à des substances dangereuses par un abaissement des normes sanitaires.
Une ratification irait "dans le bon sens", lui a répondu Emmanuel Macron, tout en réaffirmant la nécessité de s'assurer qu'il soit "bien mis en œuvre". Le chef de l'Etat a souligné que l'ex-ministre s'était "battu pour améliorer" le texte de l'accord.
Négocié pendant plus de sept ans, l'"Accord économique et commercial global" (AECG) - en anglais Ceta - avait été approuvé par le Parlement européen en février 2017. Il doit être ratifié par les 38 assemblées nationales et régionales d'Europe, d'où son passage par l'Assemblée, puis au Sénat à une date qui reste à définir. Treize Etats dont l'Espagne et le Royaume-Uni l'ont déjà ratifié.
Le Ceta, qui supprime notamment les droits de douanes sur 98% des produits échangés entre les deux zones, est vivement critiqué par agriculteurs et ONG, et les oppositions de droite comme de gauche.
Son examen au Palais Bourbon mercredi dernier avait donné lieu à environ 10 heures de vifs échanges, jusque tard dans la nuit.
Alors que le ministre des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian avait loué d'emblée un "accord important" dans un climat mondial "préoccupant", les socialistes avaient défendu en vain une motion de rejet, repoussée par seulement 136 voix contre 110. Les LR avaient ensuite plaidé sans succès pour un "ajournement" de la ratification (134 voix contre 116).
Initialement, le texte devait être soumis à un vote "simple" dans la foulée des débats. Mais après des protestations de l'opposition, ce sera finalement un scrutin public, mardi après-midi après les questions au gouvernement.
Ceta et Greta en même temps
Hasard du calendrier, ce vote se déroulera lors d'une journée copieuse à l'Assemblée, marquée aussi par la visite de la figure suédoise de la lutte contre le changement climatique Greta Thunberg, laquelle n'est pas la bienvenue aux yeux de certains députés LR et RN.
"On ne peut pas en même temps faire venir la Jeanne d'Arc du climat, comme certains voudraient la caricaturer à l'Assemblée nationale, et faire voter le traité de libre-échange avec le Canada qui va accélérer les flux de super-tankers partout dans le monde et qui va accroître la pollution", a commenté l'eurodéputé du Rassemblement national Jordan Bardella.
Pour Julien Aubert (LR), qui taxe aussi l'adolescente de 16 ans de "prophétesse en culottes courtes", "acheter à l'autre bout du monde une viande qu'il est possible de produire soi-même", c'est "une erreur écologique".
Plusieurs élus d'opposition se sont aussi inquiétés de l'importation de viande nourrie par des farines animales interdites en France.
"Fake news", rétorque le président de la commission des Affaires économiques Roland Lescure (LREM), soulignant que seules 36 fermes canadiennes peuvent exporter aux normes européennes.
"Nous ne transigerons jamais sur la santé et la qualité de l'alimentation", a insisté le secrétaire d'Etat Jean-Baptiste Lemoyne.
"Capitulation"
Les UDI et indépendants, "très majoritairement contre", ont évoqué de "vraies menaces", et "Libertés et Territoires" l'"accord de trop".
PS, PCF et LFI ont critiqué à l'unisson un texte "incompatible avec les accords de Paris" et avec un "veto" climatique "introuvable".
Ce traité "négocié dans l'ombre" permettrait "éventuellement à des industriels, à de grands groupes puissants canadiens, de venir contester ce que nous avons voté ici", fustige le Premier secrétaire du PS Olivier Faure. "Le principe de précaution est battu en brèche", déplore Hubert Wulfranc (PCF), quand l'Insoumise Mathilde Panot dénonce "la fin de notre souveraineté populaire, la capitulation du pouvoir politique".
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