"C'est un soulagement, une énorme émotion", réagit auprès de l'AFP Hervé Fauve, le fils du commandant de La Minerve, lundi matin. "Ils étaient près de nous, pas loin. C'est un apaisement extraordinaire", confirme Thérèse Scheirmann-Descamps, la veuve d'un des marins.
Depuis toutes ces années, La Minerve reposait par 2.370 m de fond, brisée en trois morceaux, à 18,5 milles marins (35 km) des côtes. "Certaines lettres sont encore visibles, MIN, sur le kiosque", explique M. Fauve.
Moins d'un mois aura donc suffi pour retrouver les traces de ce bâtiment militaire, coulé en quatre minutes à peine, il y a 51 ans, alors qu'il évoluait dans la rade, pour une mission de routine.
L'arrivée sur site le 16 juillet, 12 jours après la reprise des recherches, du Seabed Constructor, de la compagnie américaine privée Ocean Infinity, a permis de confirmer la localisation de l'épave. Ce navire équipé de la technologie la plus sophistiquée, dont des caméras sous-marines capables de filmer les fonds marins jusqu'à 6.000 mètres de profondeur, avait déjà permis de retrouver la trace du sous-marin argentin San Juan, disparu avec 44 hommes à bord au large de l'Argentine en novembre 2018.
"Un peu abandonnés"
Après une première cartographie des fonds marins établie par l'Ifremer, l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer, ce sont les drones du Seabed Constructor qui ont apporté dimanche la confirmation visuelle de l'emplacement de La Minerve.
Dans un communiqué, la ministre de la Défense, Florence Parly, qui avait ordonné la relance des recherches au début de l'année, a également salué le Commissariat à l'énergie atomique, pour ses analyses des mesures sismiques enregistrées lors de la disparition du sous-marin, et le SHOM, le service hydrographique et océanographique de la Marine, qui a lui assuré la direction scientifique des recherches.
Avarie des deux barres arrière, collision avec un bateau, explosion d'un missile, d'une torpille, accident du tube d'aération: de multiples causes avaient été avancées pour expliquer l'accident.
Mais les premiers éléments permettent "d'écarter ces suppositions farfelues qui ont fait souffrir les familles, comme celle d'un problème avec les Russes, ou d'un abordage violent", relève Mme Scheirmann-Descamps lundi, depuis ce modeste pavillon de Toulon où elle vit toujours, entourée de photos noir et blanc de Jules, son mari décédé: "C'est un accident", assure-t-elle, même si les autorités n'avaient de leur côté donné aucune précision sur les causes de la castastrophe lundi en milieu de journée.
En attendant le verdict des drones, qui permettront peut-être de savoir exactement ce qui s'est passé, Hervé Fauve est libéré: "Ces 52 marins avaient un peu été abandonnés".
"Un dernier adieu"
"Quand on meurt pour une cause, c'est important d'aller jusqu'au bout, on leur doit ça", insistait en mars, auprès de l'AFP, celui qui, grâce à son site internet consacré à la catastrophe, avait réussi à fédérer 41 des 52 familles touchées. Et depuis lundi matin il a entrepris de les recontacter, pour leur annoncer la nouvelle: "La plupart des parents des marins sont morts. Il n'en reste que quatre ou cinq, tous les autres sont les épouses ou les enfants".
Parmi ces épouses, justement, Thérèse Scheirmann-Descamps. Ce samedi 27 janvier 1968, cette jeune mère de deux enfants de 5 et 3 ans prépare un gâteau pour son mari, qui fête ses 29 ans le jour même. D'habitude il rentre à 08H00. Ce jour-là, elle l'attend toute la matinée, quand à midi un marin en uniforme sonne à la porte et lui dit que Jules "aura du retard": "J'ai tout de suite compris que je ne le reverrai jamais", racontait-elle en mars à l'AFP.
"Aujourd'hui, il n'y a pas de mots pour décrire mon émotion. C'est un apaisement extraordinaire", réagit-elle: "Et pour mes enfants, c'est une telle surprise, un tel bonheur, c'est énorme".
Pas d'espoir par contre de remonter les corps, confirme Hervé Fauve: "Un sous-marin israélien, le Dakar, avait coulé au large de Chypre deux jours avant la Minerve. Quand l'épave avait été retrouvée, en 1999, il ne restait plus rien". Ce qu'il attend, maintenant, c'est la cérémonie qui doit être organisée, en mer, à la verticale de l'épave: "Pour leur dire un dernier adieu".
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