Les juges avaient relaxé le 9 juillet le patron du groupe de médias La Provence, le PDG d'Orange Stéphane Richard et quatre autres prévenus, estimant qu'"aucun élément du dossier" ne permettait d'affirmer que cet arbitrage, destiné à solder le litige de l'homme d'affaires avec le Crédit Lyonnais, ait fait l'objet de "manœuvres frauduleuses" ou d'une quelconque "fraude".
Ils n'avaient pas retenu le "détournement de fonds publics" ou la complicité de ce délit reprochés aux prévenus et estimé que l'escroquerie n'était pas caractérisée.
Mais, pour le parquet, l'ancien ministre, qui subit à 76 ans une récidive de son double cancer de l'œsophage et de l'estomac, a "truqué" cet arbitrage qui lui avait notamment accordé 45 millions d'euros au titre du seul préjudice moral, en réparation d'une "faute" du Crédit Lyonnais lors de la revente de l'équipementier sportif Adidas.
Cette sentence rendue par un tribunal arbitral privé avait été définitivement annulée en 2015 au civil pour "fraude" et l'ex-patron de l'Olympique de Marseille -en faillite personnelle depuis décembre 1994- a été condamné à restituer les millions perçus, dont le montant et les délais de remboursement sont encore débattus. Lui a toujours nié avoir "volé le contribuable".
"Je ne crains en rien cet appel", a réagi Me Hervé Temime, avocat de M. Tapie, interrogé par l'AFP. "Je regrette que le parquet n'ait pas saisi l'occasion de s'incliner devant un jugement qui me paraît inattaquable, et prolonge encore une procédure totalement artificielle", a-t-il déclaré, dénonçant un "acharnement" à l'encontre de son client.
"Suite logique"
De son côté, Me Jean-Pierre Martel, avocat du Consortium de réalisation (CDR) qui est l'organisme chargé de gérer le passif du Crédit Lyonnais, a considéré que cet appel du parquet ne pouvait "surprendre personne" car il s'agit de "la suite logique des conclusions de l'instruction et des réquisitions qu'il avait prises".
Lors du procès, le parquet avait demandé des peines d'emprisonnement contre cinq des six prévenus. Contre Bernard Tapie, jugé pour "escroquerie" et "détournement de fonds publics", il avait requis cinq ans de prison ferme.
Contre Stéphane Richard, poursuivi pour "complicité" en tant qu'ancien directeur de cabinet de l'ex-ministre de l'Economie Christine Lagarde, le ministère public avait demandé trois ans de prison, dont 18 mois ferme.
Mme Lagarde avait pour sa part été condamnée fin 2016 pour "négligence" par la Cour de justice de la République mais dispensée de peine.
Au lendemain du jugement, la ministre de la Justice, Nicole Belloubet, avait estimé qu'un appel du parquet n'était "pas forcément logique".
"Il peut y avoir une cohérence" entre "deux jugements différents, l'un au civil, qui a condamné Bernard Tapie parce qu'on avait à l'époque considéré que la manière dont l'arbitrage avait été rendue n'était pas régulière" et "au pénal qui a considéré qu'il n'y avait pas d'escroquerie", avait-elle déclaré.
Le ministère public a pris sa décision à l'issue d'une réunion qui s'est tenue lundi, en l'absence du procureur de Paris, Rémy Heitz. Comme l'avait révélé Mediapart, ce dernier s'est déporté du dossier dès son arrivée à la tête du parquet, en raison de ses liens familiaux avec l'un des prévenus, Jean-François Rocchi, ancien dirigeant du CDR.
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