"Sortez nos sexes de vos états-civils", "Nos enfants vont bien", "Filiation, PMA: marre des lois a minima": le ton est donné par les pancartes, un tempo saccadé rythme la marche, écrasée de soleil.
"Nous voulons une réforme de la filiation pour toutes les familles. Aujourd'hui, c'est une filiation sous condition pour les LGBT, comme si notre vie devait toujours rester en sursis", affirme Vanessa, mi-short et étoiles dessinées sur les seins.
"Quel officier d'état-civil demande à un père qui vient déclarer la naissance de son enfant de prouver qu'il est le père? Nous avons arraché le mariage de haute lutte, mais le mariage doit être un droit, pas un devoir", renchérit Alex, sa voisine, qui voudrait que la loi aille maintenant "beaucoup plus loin".
Le combat pour la Procréation médicalement assistée (PMA) a été choisi cette année comme thème de la Marche des Fiertés par son organisatrice, l'Interassociative-Lesbienne, Gaie, bi et trans (Inter-LGBT): il s'agit de maintenir la pression alors que la PMA ouverte à toutes les femmes doit figurer dans le projet de loi de bioéthique présenté en juillet avant un examen au Parlement à l'automne.
Boulevard du Montparnasse, la foule multicolore cuit sur le bitume. Pendant plus de trois heures, le défilé, joyeux, combatif, s'est étiré jusqu'à la place de la République.
L'Inter-LGBT attendait jusqu'à 500.000 personnes. La canicule ne semble pas avoir découragé grand monde. Les "Goudoues en roue libre" ont trouvé la solution: elles sont seins nus sur leurs vélos, paillettes légères sur le torse.
Une reine de la samba a enlevé ses talons et marche pieds nus. Deux barbus ont relevé leurs robes carmin sur des bas résille "pour laisser passer l'air". Des clameurs de joie s'élèvent quand, en différents points du parcours, les pompiers arrosent la foule.
"Rien n'est acquis"
"Vous êtes beaux et belles", crache la sono sur le pont au Change. Infatigables, ils dansent, rient. Le cortège prend des allures de friture d'été, luisant, en traversant la Seine.
Deux jeunes femmes - une blonde nordique et une métis - savourent "le plaisir de s'embrasser dans la rue sans regarder dans son dos si on risque de se faire agresser", dit la blonde Amandine, 26 ans.
"Rien n'est acquis, il faut toujours se battre. Il y a encore eu une agression violente dimanche dernier à Paris", rappelle Hector, 40 ans, lunettes roses.
Cette violence, subie au quotidien, n'est pas assez dénoncée, regrette Coralie, militante lesbienne de 32 ans: "Cette année, ce sont les 50 ans de Stonewall aux Etats-Unis (des émeutes qui opposèrent policiers et gays excédés par des années de répression, ndlr) et on n'en parle pas assez".
Un petit coup d'État a tout de même eu lieu au sein du défilé: les Intersexes - des personnes nées avec des caractéristiques sexuelles ne correspondant pas aux normes du féminin ou du masculin - ont pris la tête du cortège, aux cris de "Stop aux mutilations".
"On était invisible. Ça devait s'arrêter", explique Mischa, 19 ans. Avec son collectif, il se bat pour "faire respecter le choix des enfants intersexes à subir ou pas des opérations".
Arrivée à République, la reine de la samba est de nouveau perchée sur ses talons. "La fête commence", souffle une jeune femme, paupière arc-en-ciel.
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