La plus haute juridiction de l'ordre judiciaire se réunit à partir de 14H00 en assemblée plénière, sa formation la plus solennelle, et devrait selon toute vraisemblance rendre sa décision sous quelques jours.
Elle n'est pas appelée à statuer sur le bien-fondé de l'arrêt des soins mais à trancher un débat très technique en disant notamment si le juge judiciaire - la cour d'appel - était compétent.
Après des années de procédures entre les membres d'une famille déchirée, l'équipe du CHU de Reims qui s'occupe de Vincent Lambert avait débuté le 20 mai l'arrêt de l'alimentation et l'hydratation le maintenant en vie dans un état végétatif irréversible.
Mais quelques heures plus tard, la cour d'appel de Paris, saisie par les parents qui dénonçaient une "folie", ordonnait contre toute attente la reprise de ces traitements, comme demandé par un comité de l'ONU, en attendant que celui-ci se prononce sur le fond du dossier.
L'Etat, les ministères de la Santé et des Affaires étrangères et le CHU de Reims s'étaient pourvus en cassation.
Dans son avis écrit, qu'il soutiendra oralement à l'audience, le procureur général François Molins, dont le rôle est de défendre la loi, préconise de casser la décision de la cour d'appel. Et ce "sans renvoi" devant une autre juridiction.
Si une telle cassation intervenait, cela pourrait ouvrir la voie, indirectement, à un nouvel arrêt de l'hydratation et l'alimentation prodigués à cet ancien infirmier de 42 ans, victime d'un accident de la route en 2008.
Les débats devraient porter principalement sur la compétence de la cour d'appel, juge judiciaire. Mais aussi sur la force des demandes du comité de l'ONU.
De tels litiges relèvent habituellement de la justice administrative. En avril, le Conseil d'Etat, la plus haute juridiction administrative, avait de nouveau validé la décision médicale d'arrêter les traitements. La Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) lui avait donné raison.
"Liberté individuelle"
Les parents Lambert s'étaient tournés vers le juge judiciaire pour obtenir le maintien des soins demandé le 3 mai par le Comité des droits des personnes handicapées (CDPH), émanation de l'ONU.
En première instance, le tribunal de Paris s'était déclaré incompétent.
Pour se déclarer compétente, la cour d'appel s'était fondée sur la notion juridique de "voie de fait", qui permet au juge judiciaire de sanctionner une atteinte à la "liberté individuelle" commise par l'administration. Pour les juges, cette dernière avait porté atteinte au droit "à la vie" en se dispensant de maintenir les traitements comme le demandait le CDPH.
Le procureur général François Molins souligne au contraire qu'il n'y a pas là d'atteinte à la "liberté individuelle" au sens de la Constitution et de la jurisprudence, que la décision d'arrêt des traitements était légale et que les demandes du comité de l'ONU ne sont pas contraignantes.
Il a conclu qu'en l'absence de "voie de fait", la cour d'appel n'était pas compétente.
Au sein de la famille de Vincent Lambert, les avocats de son épouse, favorable à l'arrêt des traitements, soutiennent comme M. Molins une "cassation sans renvoi".
"Le but, c'est que le dossier soit effectivement clos", "puisqu'il n'est pas possible d'aller voir d'autres juges que les juges administratifs, qui se sont déjà prononcés", résume Patrice Spinosi, qui représente Rachel Lambert lundi.
Les avocats des parents Viviane et Pierre Lambert, fervents catholiques qui jugent que leur fils n'est pas en fin de vie mais simplement handicapé, devraient demander le rejet des pourvois de l'Etat et du CHU.
Le CHU de Reims avait déjà lancé puis stoppé deux procédures d'arrêt des soins en 2013 puis 2015.
Avant son accident, Vincent Lambert avait selon son épouse pris position contre tout acharnement thérapeutique, mais il n'a pas laissé de directives anticipées.
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