Le parcours de l'exposition, découpée en dix séquences, a été imaginé "comme un opéra, avec des actes, une dramaturgie et une musique parfois puissante" par la scénographe polonaise Małgorzata Szczęśniak, souligne le commissaire de l'exposition, Stéphane-Ghislain Roussel.
"Une oeuvre étonnante, inattendue et monumentale", en hommage au cinéma, accueille le visiteur au rez-de-chaussée: un King Kong, haut de 11 m, conçu par Małgorzata Szczęśniak dans les ateliers de l'Opéra national de Paris, pour "L'affaire Makropoulos" en 2007.
"Beaucoup de choses exposées ne sont pas forcément ce qu'on attend de l'opéra, qui est un monde plus vaste a priori", prévient le commissaire de l'exposition, riche de 300 oeuvres.
La première section, "Ma peinture est ma scène", s'ouvre sur la maquette originale de l'opéra-ballet "Le coq d'or" de Natalia Gontcharova (1914), baignée par une lumière orangée, et quatre costumes de comédiens aux couleurs chatoyantes.
A ces oeuvres répondent des rouleaux de dessins de la Suisse Aloïse Corbaz et la créativité de David Hockney, l'un des premiers artistes à s'emparer de la conception des décors d'opéra.
Le dialogue ininterrompu des arts visuels avec l'opéra, considéré comme un spectacle convoquant sur scène toutes les disciplines artistiques, se raconte à travers dessins, croquis d'atelier, partitions, éléments de scénographie, maquettes, photographies et vidéos, parmi lesquels plusieurs pépites, "jamais exposées", assure le commissaire.
"Le chef-d'oeuvre absolu de l'exposition, rarement montré", selon lui, est l'installation de l'artiste américain James Turrell, dans la section "Le désir de l'oeuvre d'art total". Dans une étroite pièce accessible après un corridor plongé dans le noir, "une sculpture en lumière" de couleur mauve, qui, avec un jeu de réverbération, "crée une impression de profondeur infinie", détaille M. Roussel.
Communion des arts
Dans la même séquence, un autre trésor: le "Crescendo de couleurs" d'Arnold Schönberg détaille "pour chaque mesure (de musique) le changement de lumière des projecteurs" pour la mise en scène de "La main heureuse" entre 1910 et 1913. "C'est absolument révolutionnaire cette capacité visionnaire, à cette époque, d'orchestrer un changement de lumière pour créer la plus grande expressivité possible", s'enthousiasme M. Roussel.
En s'appropriant la conception du texte, de la musique et des décors, l'Autrichien Schönberg s'inscrit dans la quête d'une communion des arts sur la scène d'un opéra.
Dans l'acte suivant, "Ici le temps devient espace", des documents originaux sur lesquels Luigi Nono a transcrit "comment le son doit voyager" pour la pièce "Prometeo", "un joyau de musicologie précieusement conservé par sa veuve dans un coffre-fort", raconte le commissaire.
A côté, une maquette, réalisée en 1984 à la demande du compositeur italien par l'architecte Renzo Piano, d'une coque en bois présente le public dans la fosse et les musiciens dans les loges. "Son idée était de créer un opéra avec un son si puissant que l'on n'ait plus besoin de l'image", commente M. Roussel.
Trois sections proposent un détour vers les scénographies réinventées de la "Flûte enchantée" de Wolfgang Amadeus Mozart, le personnage de Saint-François d'Assise et l'oeuvre avant-gardiste "Einstein on the beach", de Philippe Glass et Robert Wilson.
L'avant-dernière séquence, "Je veux construire un opéra", interroge la dimension politique de l'opéra à travers l'engagement des artistes. A l'adaptation de "Norma" de Vincenzo Bellini en 2015 par Kara Walker dénonçant le colonialisme répondent les oeuvres protéiformes et iconoclastes de l'Allemand Christoph Schlingensief.
L'exposition se poursuit à l'Opéra-théâtre de Metz-Métropole avec deux oeuvres de Dominique Gonzalez-Foerster: un rideau de fer, commandé par l'opéra de Vienne en 2015, rendant hommage à la plasticienne Helen Frankenthaler et au photographe Gordon Parks, et une création originale.
Intitulée "Marienbad électrique", elle fait apparaître le fantôme d'une femme dans une loge par un jeu de techniques gardé secret.
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