Malgré la réouverture de certains magasins, le fonctionnement des transports publics et l'appel de la contestation à reprendre le travail, beaucoup d'habitants semblent toutefois préférer rester chez eux en raison du déploiement toujours massif de forces de sécurité, lourdement armées.
Après trois jours de quasi paralysie de la capitale, un représentant de la médiation éthiopienne a annoncé mardi soir que les deux camps avaient accepté de revenir prochainement à la table des négociations.
Les pourparlers entre les deux camps ont été suspendus le 20 mai, chaque partie voulant diriger la future instance censée mener la transition pendant trois ans.
Une campagne de désobéissance civile avait été lancée dimanche pour maintenir la pression sur les généraux au pouvoir, après le net durcissement de la répression enclenchée avec la dispersion sanglante le 3 juin du sit-in installé depuis le 6 avril devant le QG de l'armée.
Après le renversement par l'armée du président Omar el-Béchir le 11 avril, les manifestants avaient refusé de lever le camp, exigeant un transfert du pouvoir aux civils.
Mardi soir, le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné fermement les violences contre les civils et demandé qu'elles cessent immédiatement. Il a souligné l'importance du respect des droits humains et appelé à la reprise du dialogue.
Après la venue le 7 juin du Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed, les efforts diplomatiques de la communauté internationale pour instaurer une médiation devraient s'accentuer avec l'arrivée du secrétaire d'Etat américain adjoint chargé de l'Afrique, Tibor Nagy.
Il doit rencontrer au cours des deux prochains jours les représentants de chaque partie. Le Département d'Etat a précisé que l'émissaire appellerait aussi "à la fin des attaques contre les civils".
Selon un comité de médecins proche de la contestation, plus d'une centaine de personnes ont été tuées depuis le durcissement de la répression et plus de 500 blessées, la majorité dans la dispersion du sit-in. Les autorités estiment à 61 le nombre de morts, dont 49 par "tirs à balles réelles" à Khartoum.
- Patrouilles et mitrailleuses -
Mercredi matin un correspondant de l'AFP a parcouru différents quartiers de la capitale et observé des bus attendant leurs passagers aux arrêts habituels ainsi que des magasins dont les rideaux de fer étaient relevés.
Le principal marché d'or de la capitale est toutefois resté fermé et les passants étaient peu nombreux.
"Je continue de rester chez moi car je suis inquiet de la présence des forces de sécurité qui sont armées", a expliqué Samar Bachir.
Des véhicules équipés de mitrailleuses des Forces de soutien rapide (RSF) --paramilitaires accusés d'être à l'origine de la dispersion du sit-in et de la répression qui a suivi-- patrouillent dans divers quartiers de la capitale.
En réaction au lancement du mouvement de désobéissance civile, l'armée avait promis dimanche un "renforcement de la sécurité".
Plusieurs habitants ont aussi affirmé à l'AFP rester chez eux car internet n'a pas encore été totalement rétabli dans la capitale, après une coupure quasi totale lundi soir, rendant le travail de bureau plus compliqué.
Quelques entreprises privées ont également prolongé les congés de l'Aïd el Fitr, fête qui marque la fin du mois de jeûne musulman du ramadan, jusqu'à la fin de la semaine.
- Médiations -
Née en décembre d'une colère contre le triplement du prix du pain dans un pays en plein marasme économique, la contestation a rapidement pris une tournure politique.
L'annonce de la reprise des négociations intervient alors que les meneurs de la contestation avaient annoncé lundi soir qu'ils publieraient sous peu la composition de leur propre instance dirigeante avec un Premier ministre.
"La détente au Soudan invite à l'optimisme quant à un accord sur une période de transition fondée sur un partenariat réel et solide" entre les parties, a réagi Anwar Gargash, le numéro deux de la diplomatie des Emirats arabes unis.
Selon des experts, les Emirats, l'Egypte et l'Arabie saoudite semblent soutenir les généraux tandis que Washington plaide pour une transition menée par les civils.
Après sa visite au Soudan, le secrétaire d'Etat américain adjoint Tibor Nagy est attendu à Addis Abeba pour s'entretenir avec les dirigeants éthiopiens et ceux de l'Union africaine, organisation qui a suspendu le 6 juin le Soudan face à l'escalade des violences.
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