L'absence de Noursoultan Nazarbaïev ne signifie pas pour autant que le suspense sera de mise: son successeur désigné, le président par intérim Kassym-Jomart Tokaïev, est quasi-assuré de l'emporter après avoir reçu le soutien du parti au pouvoir et de l'ancien président, qui conserve un rôle clé dans le système politique.
La principale interrogation reste de savoir si M. Tokaïev réussira à reproduire les mêmes scores que son prédécesseur, élu une première fois en 1991 puis réélu à quatre reprises avec des scores dépassant les 80% des voix. Ces élections n'ont jamais été reconnues comme libres et justes par les observateurs internationaux.
Près de dix millions d'électeurs sont appelés à voter entre 01H00 et 15H00 GMT.
L'opposition présente six candidats méconnus même si trois d'entre eux ont participé (sans le favori) à un débat retransmis en direct à la télévision, une première au Kazakhstan. C'est aussi la première fois qu'une femme, Daniya Yespayeva, représentante d'un parti proche du gouvernement, est candidate à une présidentielle.
A l'inverse, Kassym-Jomart Tokaïev bénéficie du soutien sans détours de l'appareil d'Etat et de nombreuses célébrités apparues à ses côtés.
Le gouvernement a aussi réquisitionné "tous les travailleurs du secteur public, les docteurs, les enseignants, tandis que les militants qui font campagne (pour Tokaïev) sont payés sur le budget de l'Etat", accuse Kassymhan Kapparov, directeur du Bureau pour la recherche économique du Kazakhstan, un groupe de réflexion local. "Je ne pense pas qu'on puisse considérer ces élections comme légitimes".
Ancien ministre des Affaires étrangères et Premier ministre, président du Sénat de 2007 à 2011 puis de 2013 au départ de Noursoultan Nazarbaïev, Kassym-Jomart Tokaïev prône la "continuité", une référence claire aux trois décennies de règne de son prédécesseur.
Depuis son accession au poste suprême, le président par intérim a multiplié les signes d'allégeance envers Noursoultan Nazarbaïev, demeuré à la tête du puissant Conseil de Sécurité et auréolé du titre de "Père de la Nation", qui lui garantit une immunité judiciaire à vie.
Une des premières actions de Kassym-Jomart Tokaïev a d'ailleurs été de faire rebaptiser la ville d'Astana du nom de son prédécesseur. La rutilante capitale kazakhe, sortie des steppes à coup de pétrodollars, est donc officiellement devenue "Nur-Sultan".
Agitation sociale
Kassym-Jomart Tokaïev devra affronter une grogne sociale persistante depuis la chute brutale des prix du pétrole, qui ont mis au jour les faiblesses structurelles d'une économie toujours trop dépendante des hydrocarbures.
Plusieurs manifestations ont émaillé la campagne électorale, provoquant une réponse sévère des autorités qui ont intensifié la répression contre les médias et les opposants dans les semaines précédant le vote.
"Je boycotte activement l'élection", a déclaré à l'AFP Temoudjin Douissenov, un résident d'Almaty de 24 ans. Arrêté l'an passé pour avoir voulu participer à une manifestation, avant d'être rapidement libéré, le jeune homme estime que l'élection anticipée, annoncée le 9 avril, n'a pas laissé assez de temps à l'opposition pour s'organiser.
"Aucun candidat que j'aurais voulu soutenir ne serait capable de préparer une campagne électorale en deux mois", explique-t-il.
L'opposant le plus virulent à Noursoultan Nazarbaïev, l'ancien banquier en exil Moukhtar Abliazov, a appelé à des manifestations à travers le pays dimanche et plusieurs de ses partisans ont été placés en résidence surveillée avant le vote.
Parmi les autres candidats, Amirzhan Kossanov, relativement connu des Kazakhs, a participé à plusieurs élections depuis 2005, mais des doutes subsistent quand à la solidité de ses ambitions.
"J'ai discuté avec lui pour faire en sorte que le pays le connaisse mieux, sur la façon de mener campagne", a expliqué à l'AFP Sergueï Douvanov, un défenseur des droits de l'homme réputé proche de l'opposition. "Il était d'accord mais la semaine après l'enregistrement de sa candidature, il a disparu et s'est caché dans un village du nord".
Interrogé par l'AFP, Armizhan Kossanov dément et appelle ses partisans à se mobiliser: "Il est important que le régime voie qu'il doit compter sur le peuple".
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