"Prenons le temps, pour faire les choses bien. C'est une opération de grande ampleur, qui vise à créer un champion mondial de l'automobile: pas de précipitation", a déclaré le ministre français de l'Economie Bruno Le Maire sur BFMTV et RMC.
Le conseil d'administration du constructeur français doit se réunir à partir de 18H00 au siège de Boulogne-Billancourt, près de Paris, pour décider de l'ouverture éventuelle de négociations exclusives avec le groupe italo-américain dans le but de former le numéro 3 mondial de l'automobile.
Les 19 administrateurs, déjà réunis mardi soir, ont réitéré leur "intérêt" pour le projet, mais ont décidé de poursuivre l'examen du dossier, signe que des doutes persistent.
M. Le Maire, qui s'exprime au nom de l'Etat français, premier actionnaire de Renault avec 15% du capital, défend l'idée d'un "mariage entre égaux" depuis son annonce il y a neuf jours à l'initiative de Fiat Chrysler (FCA). Mais il veut éviter tout déséquilibre dans la gouvernance qui ferait passer Renault sous pavillon italien et a insisté mercredi sur la nécessité d'obtenir des garanties pour la préservation des sites industriels français.
"Nous voulons faire cette fusion, mais nous ne la ferons pas à n'importe quelles conditions", a-t-il assuré.
Le projet prévoit la création d'une holding basée à Amsterdam et détenue à parts égales par les actionnaires de Renault et FCA. La nouvelle entité serait cotée à Paris, New York et Milan.
La famille Agnelli, qui possède 29% de Fiat Chrysler, verrait sa part mécaniquement diluée à 14,5%, mais elle serait de loin le premier actionnaire, pesant près du double de l'Etat français qui tomberait à 7,5% du capital.
D'après plusieurs sources, les Français auraient obtenu que le siège opérationnel du groupe soit situé à Paris.
L'actuel président de FCA John Elkann, petit-fils de l'emblématique président de Fiat Gianni Agnelli, serait pressenti pour présider la nouvelle entité, tandis que son homologue chez Renault Jean-Dominique Senard assurerait la direction exécutive.
Selon une source proche du dossier, c'est entre FCA et l'Etat français qu'il reste des "derniers détails à régler".
Le temps presse
Les discussions se poursuivent sur trois sujets: la représentation de l'Etat français dans le conseil d'administration de la nouvelle entité, les pénalités, y compris financières, en cas de non respect des engagements sur l'emploi, et les conditions de nomination du futur directeur exécutif, sachant que M. Senard (66 ans) serait amené à quitter le groupe dans quatre ans.
Paris souhaite pouvoir peser sur le choix de son successeur, mais le temps presse. "Ce soir, le conseil d'administration doit être conclusif d'une manière ou d'une autre, cela ne peut pas être indéfiniment reporté", confie cette source bien informée des tractations en cours, sous couvert d'anonymat.
Celle-ci voit quatre issues possibles mercredi soir: "soit c'est oui, soit c'est non, soit c'est oui mais on attend des précisions complémentaires, soit ce n'est pas accepté mais on invite FCA à refaire une proposition plus tard".
FCA a déjà assuré que la fusion ne se traduirait par aucune fermeture de site de production, tout en évoquant des synergies annuelles supérieures à 5 milliards d'euros.
Le groupe issu de la fusion pèserait plus de 30 milliards d'euros en Bourse et produirait 8,7 millions de véhicules par an.
Si on y ajoute les volumes de Nissan et Mitsubishi, alliés japonais de Renault, le nouvel ensemble produirait près de 16 millions de véhicules par an, loin devant Volkswagen et Toyota (environ 10,6 millions chacun).
Renault et Fiat Chrysler atteindraient ainsi une taille critique leur permettant de financer sans problème les ruptures technologiques qui bouleversent l'industrie automobile: électrification, véhicules autonomes et connectés.
Nissan, dont Renault détient 43% du capital, et qui contrôle 15% de Renault, a indiqué qu'il n'était pas opposé à ce mariage. Le constructeur japonais, qui pourrait profiter de synergies industrielles avec le nouvel ensemble, compte deux représentants au conseil d'administration de son allié de 20 ans.
C'est le rejet par Nissan des propositions de Renault pour une intégration des deux groupes qui avait précipité ces dernières semaines le projet franco-italien.
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