"Un beau vol, un beau saut, tout était parfait !", a lancé l'ancien parachutiste de la 101e division aéroportée américaine, à son atterrissage dans un champ au nord de Carentan (Manche).
Porté par un parachute aux couleurs américaines, le vétéran, qui sautait en tandem, a été longuement applaudi par un public venu très nombreux. Casquette de la 101e Airborne, lunettes fumées, le vieil homme à la démarche hésitante a salué la foule en faisant le V de la victoire.
Il y a 75 ans jour pour jour, à seulement 22 ans, il avait embarqué en Angleterre dans un Douglas C-47 le 5 juin au soir, avant d'être largué en pleine nuit au-dessus du Cotentin avec les 9.000 autres hommes de sa division.
Alourdi par un équipement de 50 kilos, happé par la vitesse de l'avion, il était resté accroché à la carlingue, avant de parvenir à se détacher, non sans quelques blessures.
L'objectif de sa division était alors de sécuriser les routes des marais de Carentan, une ville à l'intersection des plages d'Utah et d'Omaha Beach, où devaient débarquer une centaine de milliers de soldats dès l'aube. Avec ses hommes, Tom Rice devait prendre position à l'écluse de la Barquette, sur le canal de Carentan à la mer, ce qu'il fit avec succès.
"On a détruit votre pays"
Depuis cette date, le parachutiste devenu professeur d'histoire a effectué une soixantaine de sauts, célébrant notamment le Jour J chaque mois de juin depuis six ans. "Il saute pour tous ceux qui se sont sacrifiés pendant la Seconde Guerre mondiale, aussi longtemps qu'il le pourra", raconte son épouse Brenda Rice, qui a assisté à son dernier saut.
En 1994 déjà, il avait sauté en parachute en Normandie pour les cérémonies du 50e anniversaire du Débarquement. Mais malgré les années, Tom Rice craignait toujours le ressentiment de la population française.
"Les gens de Carentan ne nous ont jamais pardonnés pour la destruction de leur ville et la mort des membres de leur famille", écrivait l'ancien professeur d'histoire de Californie, en 2004, dans son livre "Trial by Combat".
"Nous avons fait beaucoup de dégâts, des gens ont été tués, il y avait des impacts d'artillerie, des fenêtres brisées...", a raconté mercredi le vétéran, dans un entretien à l'AFP.
En 2018, le maire de Carentan Jean-Pierre Lhonneur l'a reçu en Normandie puis lui a écrit pour lui assurer que tout était pardonné depuis fort longtemps. "Tous les vétérans disent ça : +on a détruit votre pays+", explique Jean-Pierre Lhonneur. "Ils sont très surpris qu'on les accueille à bras ouverts".
"Je n'aurais jamais pensé qu'il y aurait une foule comme celle-là. C'est incroyable", s'est étonné l'ancien militaire mercredi.
"C'est plus réjouissant que vous ne pouvez imaginer. Les Français sont tellement gentils avec nous et si aimants. Pour la plupart d'entre eux, c'est comme la famille", a-t-il continué.
Ressautera-t-il en Normandie ? "Je le referai dès demain !"
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