Aux sons d'une fanfare, des membres de l'Unita vêtus d'un tee-shirt blanc à l'effigie de leur héros ont déposé le cercueil sur un monument en forme de polygone construit en hommage à Jonas Savimbi à Lopitanga (centre), son village.
Un portrait du chef historique de l'Union nationale pour l'indépendance totale de l'Angola (Unita), en civil, était posé devant la dépouille recouverte du drapeau vert et rouge de l'ex-rébellion.
"Ce moment aurait dû se produire il y a dix-sept ans", a déclaré à l'AFP Raul Danda, vice-président de l'Unita, aujourd'hui le principal parti d'opposition du pays.
Jonas Savimbi, dit le "coq noir", est mort le 22 février 2002 lors d'un affrontement avec l'armée près de Luena, dans le centre du pays. Il avait 67 ans. Dès le lendemain, des soldats l'avaient enterré en catimini dans la ville. Sa mort avait signé la fin d'une guerre civile de 27 ans qui avait fait plus de 500.000 morts.
La cérémonie samedi à Lopitanga est le résultat de longues négociations entre les autorités angolaises et l'Unita.
Ces obsèques sont "un signe important pour la réconciliation nationale", a estimé l'un des 30 enfants de Jonas Savimbi, Raphaël. Aucun représentant du gouvernement angolais n'était cependant présent aux obsèques samedi.
Femmes et enfants brûlés
Dans la foule réunie en plein air à Lopitanga, l'heure était à l'émotion. "Il a combattu pour les intérêts du peuple. Nous sommes ici pour le dernier adieu", a expliqué Jorge Kangajo, un chauffeur.
"C'est un moment très important. Nous sommes venus honorer celui qui a été un grand homme pour nous", a ajouté Antonio Praia.
Dans la capitale Luanda, les avis étaient plus partagés. Jonas Savimbi "a fait la guerre et tué des Angolais. (...) Il ne mérite par des funérailles dignes", a estimé un militaire, Adao Fortunato.
Presque toujours vêtu de son uniforme vert, revolver sur la hanche et canne à la main, Jonas Savimbi a commandé d'une main de fer une armée d'au moins 30.000 hommes, soutenue un temps par les Etats-Unis en pleine guerre froide.
Son adversaire, le Mouvement populaire de libération de l'Angola (MPLA), au pouvoir depuis l'indépendance en 1975, était, lui, appuyé par Cuba.
Autoritaire et intransigeant, Jonas Savimbi était aussi "très intelligent et très charismatique", selon Fred Bridgland, auteur de la biographie "Jonas Savimbi: a Key to Africa".
Mais "Savimbi a trahi son peuple. Il a ruiné son mouvement à cause de sa paranoïa et de son appétit sexuel", a-t-il déclaré à l'AFP. "Il a tué pour éliminer les gens dans son parti, ceux qu'ils considéraient comme une menace (...), et il a tué par jalousie sexuelle."
Des femmes qui avaient osé refuser ses avances sexuelles ont été brûlées en public, ainsi que leurs enfants.
Alleluia Savimbi a, lui, défendu son père: "On est tous des humains, on peut faire des erreurs, mais je pense que mon père a contribué à sa manière à ce que l'Angola soit aujourd'hui un pays démocratique", a-t-il déclaré à l'AFP.
Tests ADN
Dès vendredi soir, des centaines de personnes ont accompagné en moto, voiture ou camion la dépouille de Jonas Savimbi, depuis Andulo à Lopitanga, distantes d'une trentaine de kilomètres.
C'est à Andulo que la dépouille avait finalement été remise à la famille Savimbi vendredi, après quelques jours d'imbroglio entre l'Unita et le gouvernement angolais du MPLA. Un épisode qui témoigne des tensions encore vives entre l'Unita et son adversaire de toujours.
Les obsèques de samedi ont été rendues possibles par le départ en 2017 du président José Eduardo dos Santos après trente-huit années au pouvoir.
Son successeur Joao Lourenço, pourtant issu du MPLA, fait souffler un vent nouveau sur le pays.
En août 2018, une commission a été mise en place pour organiser l'exhumation et les funérailles de Jonas Savimbi.
La dépouille a été exhumée en janvier 2019. En mai, des tests ADN ont confirmé que les restes étaient bien ceux du chef historique de l'Unita, mettant fin aux plus folles rumeurs et ouvrant la voie aux obsèques publiques de samedi.
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