La hausse de 5,9% au 1er juin, attendue depuis des mois, a été confirmée dans une décision publiée au Journal officiel de jeudi. Elle fait suite aux calculs de la Commission de régulation de l'énergie (CRE), qui l'avait proposée dès le mois de février.
Mais le gouvernement avait alors temporisé, en pleine crise des "gilets jaunes" et de revendications sur le pouvoir d'achat et les coûts de l'énergie en particulier. Il avait utilisé un délai de trois mois pour appliquer la hausse, afin de laisser passer la saison hivernale durant laquelle les ménages consomment le plus d'électricité.
Le renchérissement concerne quelque 25 millions de foyers auxquels EDF et des entreprises locales appliquent le tarif réglementé de vente (TRV) d'électricité. Mais il va aussi se répercuter sur nombre d'offres de marché d'autres opérateurs, indexées sur ces TRV.
La hausse de 85 euros par an en moyenne pour un foyer se chauffant à l'électricité est dénoncée comme "injuste" par les associations de consommateurs CLCV et UFC-Que Choisir, qui vont saisir le Conseil d'État pour tenter de la faire annuler.
"C'est une hausse historique, ça fait des décennies qu'on n'a pas connu une hausse d'une telle ampleur", souligne Cédric Musso, directeur de l'action politique de l'UFC-Que Choisir, interrogé par l'AFP.
"Cette hausse va impacter plus particulièrement les précaires, qui sont des ménages qui se chauffent majoritairement à l'électricité dans des logements mal isolés et avec ce qu'on appelle des grille-pain", les convecteurs électriques, souligne-t-il.
Xavier Bertrand, président de la région des Hauts-de-France, l'a jugée "inacceptable". "Est-ce une formule mathématique qui décide ou le gouvernement?", a-t-il attaqué sur Twitter.
"Ce n'est pas le gouvernement qui fixe les tarifs", a fait valoir sa porte-parole Sibeth Ndiaye vendredi sur LCI.
La polémique risque d'ailleurs de rebondir: une autre hausse se profile pour le mois d'août, liée aux coûts de transport de l'électricité. Le président de la CRE Jean-François Carenco a dit vouloir essayer de la "limiter à 1%".
Nombreuses taxes
Le gouvernement veut désormais revoir la méthode de calcul des TRV pour l'avenir, a indiqué fin avril François de Rugy, le ministre de la Transition écologique et solidaire.
La méthode de calcul actuelle additionne différents coûts, mais la méthodologie est aussi conçue pour permettre aux fournisseurs alternatifs d'être compétitifs et de pouvoir proposer des tarifs inférieurs: c'est le principe de la "contestabilité".
Or ces alternatifs - comme Engie, Total Direct Energie ou Eni - ont vu leurs coûts augmenter avec la hausse des cours sur le marché de gros de l'électricité et un accès limité aux capacités nucléaires. Le dispositif qui leur permet d'acheter une partie de la production nucléaire d'EDF à prix fixe, baptisé Arenh, est en effet plafonné.
C'est le paradoxe dénoncé par les associations de consommateurs: le principe de la "contestabilité" est censé favoriser la concurrence au bénéfice des consommateurs, mais il se traduit par une hausse des tarifs.
"Près de 40% de cette hausse n'a rien à voir avec les coûts d'EDF", regrette Cédric Musso. Cela "va aboutir à gonfler les marges notamment de l'opérateur historique (EDF) de 87%", selon lui.
Le PDG d'EDF, Jean-Bernard Lévy, préfère pour sa part pointer du doigt un autre problème: "Il faudrait peut-être réfléchir à moins taxer l'électricité, puisqu'elle n'émet pas de dioxyde de carbone".
Les prix intègrent en effet de nombreuses taxes: contribution tarifaire d'acheminement (CTA), contribution au service public de l'électricité (CSPE), taxes sur la consommation finale d'électricité (TCFE) et TVA... qui s'applique aussi sur les taxes.
François de Rugy lui a répondu en ciblant les "coûts salariaux" d'EDF - notamment le tarif préférentiel de l'électricité dont bénéficient les salariés - et les "dérives sur le parc électro-nucléaire français".
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