L'avocat général Jean-Pierre Bonthoux a demandé à la cour d'assises de prononcer "le maximum de la peine prévue" pour meurtre, ainsi qu'un nouveau mandat d'arrêt à l'encontre de l'ex-journaliste pigiste de 62 ans.
Très vite suspecté par la police irlandaise, Ian Bailey avait été placé deux fois en garde à vue en 1997 et 1998. Il a toujours nié être l'auteur du crime et n'a jamais été poursuivi en Irlande faute de preuves suffisantes. Dublin a par ailleurs refusé par deux fois sa remise à la France, invoquant l'absence de réciprocité en matière d'extradition.
Dénonçant une "parodie de procès", le Britannique avait annoncé dans la presse qu'il ne répondrait pas à la convocation de la justice française et ne serait pas représenté. Il est donc jugé depuis lundi selon la procédure dite de "défaut criminel", par trois magistrats professionnels et sans l'assistance des jurés.
L'absence de M. Bailey est un "manque de courage", et "quand on associe cette couardise à l'opprobre qu'on tente de jeter sur une institution, un système qui serait indigne à ses yeux et qu'on y ajoute le mépris, c'est insupportable", a estimé l'avocat général.
"Ce n'est pas un procès sans preuves, il y en a heureusement un certain nombre", a souligné M. Bonthoux.
"Accumulation de charges"
Ce matin du 23 décembre 1996, quand le corps de la productrice française de 39 ans et femme du producteur de films Daniel Toscan du Plantier avait été découvert, le crâne fracassé, en contrebas de sa maison isolée de Schull, sur la côte sud-ouest de l'Irlande, le journaliste britannique est l'un des premiers sur les lieux et "a connaissance d'éléments qui ne sont pas connus du public, qu'il n'a pas reçus de la part de personnes extérieures", a appuyé l'avocat général.
Il porte également sur le front et les avant-bras des égratignures similaires à celles retrouvées sur le corps de Sophie Toscan du Plantier - qui s'est farouchement débattue contre son agresseur - et pouvant correspondre à des épines de ronces.
Des griffures qu'il n'avait pas le soir du 22 décembre alors qu'il jouait du tambour traditionnel dans un pub, les manches relevées, avaient déclaré six témoins à la police irlandaise. Il avait assuré s'être égratigné en découpant des dindes et un arbre de Noël "mais je crois que c'est M. Bailey qui nous prend pour des dindes", a lancé Jean-Pierre Bonthoux.
Le Britannique a aussi "extrêmement varié" sur son emploi du temps, a relevé le représentant de l'accusation.
Ian Bailey a surtout "fait des aveux", à sa rédactrice en chef, à des amis et à un adolescent qu'il a pris en stop, et un "aveu indirect mais extrêmement détaillé" à un ex-ami et employeur, venu témoigner mardi à la barre.
Ce soir de pleine lune, alors qu'il est alcoolisé, il vient la voir parce qu'"il la désire", "elle essaye de se sauver et malheureusement il la rattrape, il la frappe (...) et l'achève", a avancé l'avocat général.
"C'est un crime atroce, barbare sur une femme qui est seule" et qui a "vécu sans doute deux, trois minutes de terreur et de souffrances", a-t-il pointé, jugeant que "l'intensité du crime mérite une condamnation exemplaire".
Malgré l'absence de preuve scientifique reliant le Britannique au crime - le corps de la victime avait été laissé dehors sous une bâche plus d'une journée, dans ce comté où le dernier meurtre remontait à 1922 - il y a "une accumulation de charges" permettant de le condamner, a considéré M. Bonthoux.
Mercredi, les trois avocats des membres de la famille de Sophie Toscan du Plantier, parties civiles au procès, avaient également accablé l'accusé britannique et sa "folie meurtrière", et dit espérer "que justice soit enfin rendue", plus de 22 ans après les faits.
Le verdict est attendu dans l'après-midi.
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