Prévu bien avant le scrutin, ce conseil des ministres restreint devait être une simple étape pour que les responsables de l'énergie, des transports, du logement ou de l'agriculture accouchent avant la fin de l'année d'un plan contraignant face au réchauffement climatique.
Si Angela Merkel a reconnu mardi auprès de CNN qu'il faut "de meilleures réponses", la dirigeante conservatrice, physicienne de formation au fait des enjeux techniques, n'a pas levé le mystère sur les mesures qu'elle souhaite.
Piquée au vif par le score calamiteux de son parti social-démocrate, la ministre de l'Environnement, Svenja Schulze, a tenté lundi d'accélérer le calendrier: elle a envoyé à chaque ministère son propre projet de loi, mis en sommeil depuis février par la chancellerie.
"Je ne peux plus tenir compte des états d'âme" du parti conservateur, s'est-elle agacée sur Twitter. "Nous avons besoin de plus d'engagement sur la protection du climat."
L'un des responsables chrétiens-démocrates, Georg Nüsslein, a aussitôt dénoncé "une manoeuvre grossière et inspirée par la panique".
"Pour beaucoup, la prétendue protection du climat est devenue une religion de substitution", a pesté de son côté Joachim Pfeiffer, spécialiste des questions économiques à la CDU.
Sortie du charbon
Pourtant, selon les analyses d'après vote, 46% des électeurs ont fait de la question climatique le principal moteur de leur choix, un bond de 26 points par rapport aux Européennes de 2014.
Bâti dans la douleur entre deux camps affaiblis, le quatrième gouvernement Merkel a promis l'an dernier de ramener dans les clous les émissions allemandes de gaz à effet de serre, alors que le pays a déjà renoncé à ses objectifs 2020.
Faute d'une politique ambitieuse, l'Allemagne manquera aussi ses engagements pour 2030, soit 55% de réduction de ses émissions par rapport à 1990, reconnaissait mi-mai un rapport gouvernemental.
Concrètement, experts et associations attendent des avancées sur deux points: des plans détaillés par secteur, que chaque ministère était censé ficeler avant mercredi, et une fixation du "prix du CO2" pour créer une incitation générale à moins polluer.
Seul le ministère de l'Economie a avancé en annonçant la semaine dernière un plan de 40 milliards d'euros pour les régions concernées par l'abandon programmé du charbon d'ici 2038, périlleux chantier dans des bassins miniers tentés par l'extrême droite.
Mais les Transports sont aussi attendus au tournant vu leur piteux bilan climatique: le secteur est le seul qui échoue depuis 1990 à diminuer ses émissions, la hausse du trafic et l'appétit pour les grosses voitures compensant l'amélioration des moteurs.
Fossé générationnel
Or Berlin a toujours ménagé les automobilistes et les constructeurs, refusant par exemple de limiter la vitesse sur les autoroutes ou de programmer la sortie des moteurs à combustion.
Chaque camp est de surcroît divisé sur la "taxe carbone" proposée par Svenja Schulze, qui pousserait ménages et entreprises à investir dans des modes de chauffage, de transport ou de production plus "propres".
En pleine crise d'identité, le SPD est déchiré entre la tentation d'intégrer les thématiques environnementales et la crainte de s'aliéner sa maigre base populaire, en alourdissant le budget des locataires ou des habitants des périphéries.
Quant aux conservateurs, toujours plébiscités par les plus âgés, ils peinent à prendre au sérieux la priorité accordée au climat par les jeunes Allemands.
"Si les primoélecteurs gagnaient leur propre argent (...), le résultat du vote serait peut-être différent", tweetait lundi soir le secrétaire d'Etat CDU Thomas Bareiss, s'attirant une vague de critiques.
Mais la semaine dernière, le vétéran conservateur Wolfgang Schäuble, ex-rival et maintes fois ministre d'Angela Merkel, jugeait "bon que les jeunes mettent la pression". "Il faut sortir de l'idée" que la politique climatique "ne doit léser personne", exhortait-il.
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