"C'est un résultat catastrophique", s'alarme un haut dirigeant de LR en quittant le siège du parti où l'atmosphère s'est peu à peu alourdie à mesure qu'approchait 20h00. Selon les estimations, la liste Bellamy recueille entre 8 et 9%, loin des 11 à 14% que lui prêtaient les ultimes sondages.
"Nous n'avons pas pu faire entendre notre voix. Et ce résultat n'est évidemment pas à la hauteur des espoirs soulevés pendant la campagne", a concédé M. Wauquiez, le visage serré, lors d'une brève déclaration.
Le patron de LR s'est donné "trois ans" pour bâtir "une nouvelle voie" pour la présidentielle de 2022, accusant Emmanuel Macron d'avoir été "l'artisan de la progression" du Rassemblement national.
Après ce premier scrutin intermédiaire du quinquennat, LR voulait se présenter en "première alternative crédible" à Emmanuel Macron. Immense déception: le parti gaulliste est quatrième derrière Europe Écologie-Les Verts. Une humiliation pour un parti déjà traumatisé de la troisième place de François Fillon au premier tour de la présidentielle de 2017.
"C'est un séisme pour la droite, son plus mauvais score en France, alors que la droite européenne progresse", a réagi un proche de la présidente de l'Île-de-France Valérie Pécresse, rivale de Laurent Wauquiez.
Enseignant en philosophie et élu local de Versailles, choisi dans le scepticisme général par M. Wauquiez avant de séduire les militants LR durant la campagne, François-Xavier Bellamy ne réalise donc pas la moitié du résultat obtenu en 2014 (20,81%) et le nombre d'eurodéputés LR à Strasbourg devrait être divisé par deux.
"La droite traverse une crise profonde, tout est à reconstruire", a réagi M. Bellamy.
Sa liste arrive également en deçà du score (15,77%) totalisé par le candidats LR lors des élections législatives de 2017, quand une partie des cadres avaient déjà rejoint Emmanuel Macron au gouvernement.
Elle se classe en dessous du pire score (12,82%) réalisé lors d'élections européennes par Nicolas Sarkozy en 1999.
Pression sur Wauquiez
En privé, l'ex-chef de l'État a souligné qu'il avait alors cédé la direction du parti. Une manière de mettre la pression sur les épaules de Laurent Wauquiez, contesté depuis son élection à la tête du parti fin 2017.
"C'est un désaveu pour Laurent Wauquiez et la ligne choisie depuis janvier 2018", juge un proche de Mme Pécresse, qui a fondé son propre mouvement, Libres!, associé à LR.
La semaine promet donc d'être agitée au sein du parti de droite, sur un paradoxe: au fur et à mesure de la campagne, les voix les plus sceptiques sur le choix de M. Bellamy, dont celle du président du Sénat Gérard Larcher, avaient fini par se rétracter, au vu du succès remporté dans les meetings.
Mais les critiques momentanément mises en sourdine devraient rapidement resurgir au sujet de la ligne prônée par M. Wauquiez, du profil "conservateur" de la tête de liste comme de sa gouvernance jugée "solitaire" au sommet du parti.
"Disons la vérité, c'est un échec", a réagi M. Larcher dimanche soir. Pour le président du Sénat, LR "devra repenser sa ligne politique", "rassembler plus largement" et "exprimer plus clairement la diversité qui le compose".
"Ntre stratégie n'a pas été la bonne", a jugé l'ancienne ministre Rachida Dati.
Le chef de file des sénateurs LR Bruno Retailleau a "lancé un appel à toutes les personnalités des Républicains et des centristes pour, enfin, refonder".
"La droite doit désormais refonder son projet autour de questions économiques, sociales et environnementales. Nous devons tous prendre conscience que le conservatisme sociétal et les questions identitaires seules ne nous permettront jamais de gagner l'élection présidentielle", a averti, auprès de l'AFP, le 2e vice-président du parti et député de l'Ain Damien Abad.
Du côté de Matignon, on juge que LR est devenu "une micro-niche partisane". Ce "crash", "ça veut dire que le pari stratégique et politique du président fonctionne", juge un proche d'Edouard Philippe, qui a quitté LR en rejoignant Emmanuel Macron.
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