Le centre-droit de la chancelière signe avec 28% des voix le plus mauvais score de son histoire, même s'il reste le premier parti. Son partenaire social-démocrate au gouvernement subit une véritable débâcle avec 15,5%, se faisant doubler par des Verts, au-delà de 20%, là aussi un record.
Ces mauvais chiffres viennent affaiblir encore le gouvernement, qui depuis les législatives de 2017 navigue de crise en crise, forçant même fin 2018 la chancelière à quitter la tête de son parti, la CDU.
"On peut appeler ça un signal d'alarme, une gifle ou un coup sous la ceinture", relève dimanche le quotidien Süddeutsche Zeitung.
Micro coalition
Autre mauvaise nouvelle pour les partis traditionnels, l'extrême droite Alternative pour l'Allemagne (AfD) s'ancre toujours plus fermement dans le paysage politique avec son nouveau record aux Européennes (10,5%).
Ces résultats risquent donc en particulier de relancer au SPD le débat sur la nécessité d'un virage à gauche et d'aller se ressourcer dans l'opposition.
"Il va y avoir un nouveau débat sur l'opportunité de rester dans la grande coalition", la GroKo, prédit Die Welt.
Katja Kipping, figure du parti de gauche radicale Die Linke, y est aussi allée de son pronostic : "La Groko, c'est micro maintenant et elle ne va pas durer".
En soi, le SPD a prévu de trancher la question en septembre, à mi-législature. Mais depuis des jours les médias allemands font état de luttes intestines pour écarter la chef du parti, Andrea Nahles, favorable à un maintien au gouvernement jusqu'ici.
La CDU de Mme Merkel a donc presque supplié les sociaux-démocrates de ne pas claquer la porte du gouvernement. La coalition "doit continuer, il faut que la stabilité règne dans le pays", a souligné le secrétaire général des conservateurs, Paul Ziemiak.
La nouvelle chef des chrétiens-démocrates CDU, Annegret Kramp-Karrenbauer, dauphine de la chancelière, tentait de faire bonne figure, assurant avoir atteint son objectif en arrivant en tête dimanche soir.
Mais au-delà des Européennes, son parti craint des débâcles électorales en septembre et en octobre, quand trois scrutins régionaux sont prévus en ex-Allemagne de l'Est, des bastions de l'AfD où ce parti espère enregistrer des succès susceptibles de contraindre Mme Merkel au départ avant la fin de son mandat en 2021.
Une implosion de la coalition de la chancelière apparait donc comme un risque réel, et aucune majorité alternative évidente n'existe. Des élections anticipées pourraient même se tenir.
Jusqu'ici, la dirigeante allemande a cependant défié tous les pronostics et sa chute est loin d'être acquise.
Selon les sondages de référence Deutschlandtrend et Politbarometer des derniers mois, les Allemands sont entre 60 et 70 % à vouloir qu'elle reste, quand son gouvernement n'a que 38% d'opinions favorables.
Les états-majors du centre-droit et du SPD se retrouvent lundi, séparément puis ensemble, pour tenter de tirer des conclusions des élections.
Le climat, grande thématique
Une leçon majeure du scrutin était cependant déjà sur toutes les lèvres dimanche en Allemagne : la mobilisation de l'électorat sur le thème de l'urgence climatique, alors que le gouvernement allemand a raté ses objectifs de réduction des gaz à effet de serre et peine toujours à dessiner une stratégie claire.
Quelque 68% des Allemands jugeaient, selon un récent sondage de la télévision publique ARD, que trop peu était fait sur le climat.
Le parti écologiste, qui s'est rapproché du centre et forme en régions des coalitions aussi bien avec la droite que la gauche, en a profité dans les urnes après des semaines à flirter avec les 20% dans les enquêtes.
"C'est la première fois que le changement climatique joue un tel rôle dans une élection", s'est félicité Robert Habeck, un chef des Verts.
Cet intérêt accru avait été illustré vendredi par une vidéo de dizaines de YouTubeurs allemands appelant leurs millions d'abonnés à voter contre les partis de la GroKo en raison de leur politique trop timide sur le climat.
Les manifestations de lycéens et étudiants du vendredi, les Fridays for future, gagnent aussi en popularité, alors que le parti de Mme Merkel les intimait de retourner en classe.
Témoignant d'une certaine rupture générationnelle, les analyses de la chaîne ARD relèvent que plus du tiers des moins de 25 ans ont voté Verts aux européennes, contre 11% au centre-droit qui récolte par contre la majorité des voix des seniors.
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