La "taxe Gafa" (acronyme de Google, Amazon, Facebook et Apple), déjà adoptée à l'Assemblée nationale, doit faire de la France un des pays pionniers en la matière, en dépit de l'opposition des Etats-Unis.
La chambre haute a adopté l'ensemble du texte, qui comprend également un volet sur l'impôt sur les sociétés, par 181 voix pour et 4 voix contre et 158 abstentions.
Députés et sénateurs vont maintenant tenter de se mettre d'accord sur une version commune en commission mixte paritaire, faute de quoi une nouvelle lecture sera nécessaire.
La "taxe Gafa à la française" s'inspire largement d'un projet européen qui n'a pas abouti en raison des réticences de l'Irlande, de la Suède, du Danemark et de la Finlande.
Pour le ministre de l'Economie, cette solution unilatérale doit servir de "levier" dans les négociations internationales, dans l'attente d'un aboutissement des travaux de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).
Le ministre a de nouveau pris l'engagement de la "retirer immédiatement dès qu'il y aura un consensus au niveau de l'OCDE".
Il a aussi estimé, en réponse aux inquiétudes formulées par le rapporteur de la commission des Finances Albéric de Montgolfier (LR), "qu'il n'y a pas de raison de s'inquiéter de la solidité juridique" du dispositif.
Concrètement, la taxe doit concerner les activités numériques qui "créent de la valeur grâce aux internautes français".
Elle vise les entreprises qui font un chiffre d'affaires sur leurs activités numériques de plus de 750 millions d'euros dans le monde, dont 25 millions d'euros pouvant être rattachés à des utilisateurs localisés en France. L'idée est de les imposer à hauteur de 3% du chiffre d'affaires réalisé en France sur la publicité ciblée en ligne, la vente de données à des fins publicitaires et la mise en relation des internautes par les plateformes.
Elle devrait s'appliquer à une trentaine de groupes comme Meetic, Amazon, Airbnb, Instagram ou encore la française Criteo, et rapporter 400 millions d'euros en 2019, puis 650 millions en 2020.
Critique vis-à-vis d'un dispositif "mal préparé", le groupe LR a néanmoins choisi de soutenir "le principe de cette taxe, dans le seul espoir qu'elle permette d'accélérer les négociations au sein de l'OCDE". Elle a reçu également le soutien des centristes et des Indépendants.
Pour la gauche, "la taxe va dans le bon sens, mais reste largement insuffisante". Pascal Savoldelli (CRCE à majorité communiste) a raillé l'acronyme du "Grand Affichage Annuel du Gouvernement".
Désarmement unilatéral"
Les sénateurs ont souhaité "sécuriser" le dispositif en renforçant la protection des données personnelles des utilisateurs français et en prenant en compte la double imposition qui pourrait frapper des entreprises déjà soumises à l'impôt sur les sociétés en France.
Surtout, ils ont inscrit dans la loi le caractère "temporaire" de la taxe, prévoyant son extinction au 1er janvier 2022. Un "bornage" dans le temps regretté par la gauche comme par le gouvernement. "C'est du désarmement unilatéral", a lancé le ministre.
Le Sénat a en outre adopté des amendements précisant le champ d'application de la taxe et ses modalités techniques.
La taxe, dont l'instauration avait été annoncée par Emmanuel Macron en décembre, en pleine crise des "gilets jaunes", doit contribuer à financer les 10 milliards d'euros de mesures d'urgence économiques et sociales.
Même objectif pour le second volet du projet de loi qui infléchit la trajectoire de baisse de l'impôt sur les sociétés pour 2019 pour les grandes entreprises.
Le Sénat l'a adopté de justesse, par 163 voix contre 159, la droite déplorant que la mesure revienne "sur un engagement du gouvernement".
M. Le Maire a assuré que cet infléchissement pour 2019 ne remettait pas en cause l'engagement du gouvernement que "le taux d'impôt sera de 25% pour toutes les entreprises sans exception en 2022".
"L'impôt sur les sociétés baissera pour toutes les entreprises en 2020", s'est ensuite engagé le secrétaire d'Etat au numérique Cédric O.
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