Un mois après sa victoire écrasante face au sortant Petro Porochenko, le plus jeune président de l'Ukraine post-soviétique, 41 ans, prête serment lors d'une cérémonie débutant à 07H00 GMT, une main posée sur la Constitution probablement accompagnée, selon la tradition, d'une Evangile du 16e siècle.
Il prononcera ensuite une adresse à la Nation, événement attendu étant donné les inconnues entourant les intentions de ce comédien élu sans programme précis, capitalisant sur la défiance des Ukrainiens envers leurs élites avec ses promesses de mettre fin à la corruption et de "casser le système".
La scène a déjà eu lieu à l'écran: dans la série télévisée "Serviteur du peuple" où Volodymyr Zelensky incarne un professeur d'histoire subitement élu président.
Cette fois, elle sera bien réelle bien qu'inimaginable il y a quelques mois. Peu ont pris au sérieux l'acteur et humoriste quand il a annoncé sa candidature le 31 décembre. Mais à l'issue d'une campagne inédite, jouée essentiellement sur les réseaux sociaux, il a remporté plus de 73% des suffrages au second tour de la présidentielle le 21 avril face au sortant Petro Porochenko.
Elu il y a cinq ans dans la foulée du soulèvement proeuropéen du Maïdan, M. Porochenko a dirigé le pays pendant une période critique de son histoire, après l'annexion de sa péninsule de Crimée et le déclenchement dans l'est d'un conflit armé avec les séparatistes prorusses, qui a fait depuis 13.000 morts.
S'il a évité un effondrement du pays et lancé une série de réformes-clés, on lui reproche de n'avoir pas fait assez pour améliorer le niveau de vie des Ukrainiens et pour lutter contre la corruption endémique.
"Besoin de changements"
Volodymyr Zelensky s'engage à maintenir le cap prooccidental de cette ex-république soviétique, mais son programme reste flou et son équipe largement inconnue. Beaucoup s'interrogent sur sa capacité à diriger un pays toujours confronté à d'immenses défis: une guerre qui se poursuit et de lourdes difficultés économiques.
L'un des chefs séparatistes, Denis Pouchiline, a assuré vendredi à l'agence russe Ria-Novosti être "prêt au dialogue mais dans les intérêts du Donbass", le bassin houiller sous contrôle des rebelles. Il s'est inquiété de déclarations "destructives" du nouveau pouvoir et accusant Kiev de "bloquer le processus de paix", dans l'impasse.
Des doutes subsistent également quant à la capacité du nouveau président à gouverner sans majorité au Parlement alors que même la date de l'investiture y a provoqué des tensions entre son équipe et les députés.
Face à une classe politique frondeuse, Volodymyr Zelensky a menacé de dissoudre la Rada pour profiter de l'élan de sa victoire écrasante lors de législatives anticipées, sans attendre le scrutin prévu en octobre. Mais les députés semblent déterminés à lui mettre des bâtons dans les roues pour l'empêcher de lancer cette procédure.
"Le pays a besoin de changements et réformes profondes", a plaidé l'équipe du président élu dans un communiqué vendredi. "C'est une demande du peuple ukrainien. Et pour cela, il faut un Parlement capable de fonctionner".
Les alliés de Kiev ont chaleureusement accueilli l'élection de M. Zelensky, une "stratégie d'accolades" selon un site ukrainien spécialisé dans les affaires internationales pour s'assurer qu'il poursuivra le rapprochement avec l'Occident.
Mais le nouveau président se trouve déjà confronté à plusieurs situations délicates sur le plan international, un aperçu des défis auxquels est confronté le pays.
Trois jours après son élection, le Kremlin a facilité l'octroi de la nationalité russe aux habitants des territoires séparatistes de l'est de l'Ukraine, initiative vue par beaucoup de commentateurs à Kiev comme un test pour M. Zelensky qui l'a fermement condamnée.
En mai, l'avocat personnel de Donald Trump, Rudy Giuliani, a annulé une visite à Kiev évoquant des "ennemis" du président américain présents selon lui dans l'entourage de M. Zelensky, faisant craindre de possibles crispations avec la Maison Blanche, alliée cruciale de Kiev face à Moscou.
L'ascension à la présidence "n'est pas la fin de vos aventures, ce n'est que leur début", l'a averti le député prooccidental Serguiï Vyssotsky.
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