L'icône du cinéma français des décennies 1960 et 1970 recevra dans la soirée cette Palme pour l'ensemble de sa carrière des mains de sa fille Anouchka.
Si cette Palme, après celles remises à Jean-Paul Belmondo ou Jean-Pierre Léaud, apparaît comme une récompense tardive pour celui qui a tourné avec des réalisateurs de premier ordre comme Visconti, Melville ou Antonioni, elle a toutefois déclenché une polémique avant même le début du Festival.
Des féministes ont reproché à l'acteur d'être "raciste, homophobe et misogyne", selon les termes de l'association américaine Women and Hollywood, s'appuyant sur des propos qu'il a tenus par le passé. Une pétition, qui a recueilli plus de 25.000 signatures, a demandé à Cannes de "ne pas l'honorer".
"Pas d'honneur pour les agresseurs", a réagi également le collectif français Osez le féminisme. "#MeToo ne nous a donc rien appris? Nous exigeons que le Festival de Cannes refuse d'honorer un agresseur misogyne".
Dans le JDD, l'acteur a reproché à ses détracteurs d'avoir "inventé des déclarations".
"Je ne suis pas contre le mariage gay, je m'en fous : les gens font ce qu'ils veulent. Mais je suis contre l'adoption par deux personnes du même sexe (...) J'ai dit que j'avais giflé une femme ? Oui. Et j'aurais dû ajouter que j'ai plus reçu de baffes que je n'en ai données. Dans ma vie, je n'ai jamais harcelé une femme".
"On a voulu me coller l'étiquette extrême droite parce que j'ai raconté que j'étais copain avec (Jean-Marie) Le Pen depuis l'armée. Non, je suis de droite, point", a-t-il encore dit.
Dénonçant une "police politique", le délégué général Thierry Frémaux a également défendu l'acteur en début de semaine: "Alain Delon a le droit de penser ce qu'il pense", a-t-il dit, estimant "compliqué de juger avec les lunettes d'aujourd'hui des choses qui se sont passées et dites il y a quelques années".
S'il a accepté de recevoir cette Palme d'honneur, le comédien de 83 ans, au caractère orageux a par ailleurs toujours entretenu des relations mouvementées avec le Festival de Cannes.
"plus jamais les marches"
Il était venu pour la dernière fois sur la Croisette en 2013 pour la projection d'une copie restaurée de "Plein Soleil" de René Clément, "son maître absolu", après avoir présenté en 2010 une version restaurée du "Guépard".
Mais avant cela, il avait boudé pendant dix ans le festival, vexé de ne pas avoir été invité, tout comme Jean-Paul Belmondo, aux célébrations du 50e anniversaire en 1997.
C'est pourtant à Cannes qu'Alain Delon a mis un premier pied dans le cinéma en 1957, invité par son ami Jean-Claude Brialy.
Il montera ensuite pour la première fois les marches cannoises en 1961 pour "Quelle joie de vivre" de René Clément, en compétition, puis pour "L'Eclipse" de Michelangelo Antonioni en 1962, Prix du jury, et "Le Guépard" de Luchino Visconti, Palme d'or 1963.
Mais en 1976, alors qu'il vient avec "Monsieur Klein" de Joseph Losey, le film est froidement accueilli, provoquant l'agacement de l'acteur.
Cette première fâcherie avec Cannes s'amplifie en 1984, quand "Notre histoire" de Bertrand Blier, dans lequel il joue, n'est pas sélectionné. Alain Delon se livre alors à un réquisitoire au vitriol contre les responsables du festival.
Il faudra attendre la présence en compétition de "Nouvelle vague" de Jean-Luc Godard, en 1990, pour qu'il fasse un retour à Cannes en fanfare, prenant un bain de foule.
En 1992, l'acteur, qui aime tester sa popularité, récidive en se rendant à pied à la projection du "Retour de Casanova" d'Edouard Niermans.
Mais cette nouvelle idylle ne sera que de courte durée. Il boude à nouveau le festival à partir de 1997, déclarant même en 2006 qu'il ne montera "plus jamais les marches".
Les retrouvailles seront pourtant célébrées en 2007, alors qu'il est invité pour le 60e Festival. "Il n'y a que les imbéciles qui ne changent pas d'avis!", avait-il commenté alors, arborant un badge marqué "star" et enflammant à nouveau la foule.
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