Des divisions affleurent notamment chez les catholiques, qui ont le plus pris la parole sur cet ancien infirmier de 42 ans en état végétatif depuis plus de 10 ans, devenu l'emblème de l'épineux débat sur la fin de vie.
Eric de Moulins-Beaufort, président élu de la Conférence des évêques de France, a appelé vendredi à prier pour que la société française "ne s'engage pas sur la voie de l'euthanasie".
En début de semaine, il estimait déjà que M. Lambert, "si dépendant soit-il (...) n'est pas en fin de vie", rejoignant ainsi les parents du patient, qui s'opposent à la décision médicale de cesser l'alimentation et l'hydratation de leur fils pour éviter un "acharnement thérapeutique".
"C'est l'honneur d'une société humaine que de ne pas laisser un de ses membres mourir de faim ou de soif", a affirmé le prélat.
Une position partagée sur les réseaux sociaux par de nombreux évêques -- qui jugent "aberrant" de laisser quelqu'un mourir alors qu'il n'est "ni malade, ni en fin de vie" -- ou encore au sein des associations familiales catholiques, qui s'"alarment de ce droit à mettre fin, légalement, à la vie d'un homme diminué".
La loi Claeys-Leonetti de 2016, qui régit la fin de vie en France, interdit l'euthanasie et le suicide assisté mais autorise l'arrêt des traitements en cas "d'obstination déraisonnable".
Invoquer l'argument de l'"obstination déraisonnable" dans le cas de Vincent Lambert est problématique selon le jésuite Bruno Saintôt: "Pourquoi ne s'appliquerait-il pas aussi aux 1.700 autres patients cérébrolésés admis dans des unités spécialisées ?"
Conflit familial
Prêtre catholique belge travaillant en soins palliatifs et accompagnant des personnes demandant l'euthanasie (autorisée en Belgique), le père Gabriel Ringlet trouve au contraire "légitime et profondément éthique" d'interrompre la vie de M. Lambert.
"C'est de l'idéologie de prétendre qu'une fin de vie comme celle qu'il vit maintenant est qualitative!" affirme-t-il à l'AFP, assurant pour autant être "un grand défenseur de la vie la plus fragile".
Sur le plan médical, la loi "permet dans notre pays, d'arrêter les traitements actifs et l'alimentation dans de tels cas, permettant à la mort de s'installer naturellement", témoigne de son côté le président de la commission éthique et société de la Fédération protestante de France, Jean-Gustave Hentz, au journal Réforme. Pour lui, "il ne s'agit pas d'une euthanasie".
"Est-ce qu'une vie végétative avec un encéphalogramme plat, entretenue par une machine, est une vie ?", interroge pour sa part Tareq Oubrou, imam de Bordeaux. "Ce n'est plus une vie au sens théologique", dit-il. "L'euthanasie passive, dans ce cas de figure, est pensable et tolérée", estime-t-il, tout en demandant que soient respectés les avis des proches, à commencer par la compagne de Vincent Lambert.
Pour d'autres, comme Véronique Margron, théologienne et présidente de la Corref (responsable des religieuses et religieux dans les institutions catholiques), le coeur du débat s'est en réalité éloigné des questions éthiques sur la fin de vie.
"Dans le cas de M. Lambert, il n'est pas seulement question de fin de vie, de l'interprétation de la loi, mais de conflits familiaux", affirme-t-elle à l'AFP.
La famille est en effet déchirée entre, d'un côté, notamment les parents du patient qui s'opposent à l'arrêt des soins et, de l'autre, son épouse et des frères et soeurs qui dénoncent un acharnement thérapeutique.
De ce fait , "il n'y a plus de bonne décision", selon Mme Margron, qui déplore "la façon dont les proches n'ont pas pu ou voulu se mettre d'accord" et leur choix de "se saisir de l'opinion pour construire deux camps".
Sur la même ligne, le grand rabbin de France Haim Korsia ne se prononce pas sur ce cas où "toutes les juridictions, toutes les morales sont instrumentalisées depuis des années", qui "dépasse les questions éthiques" et aboutit à une histoire de "violence intrafamiliale".
A LIRE AUSSI.
Affaire Vincent Lambert: l'arrêt des soins de nouveau validé par le Conseil d'Etat
Affaire Vincent Lambert: la CEDH ouvre la voie à l'arrêt des soins
Affaire Vincent Lambert: le médecin annonce l'arrêt des traitements la semaine du 20 mai
Vincent Lambert: les experts confirment son "état végétatif chronique irréversible"
Vincent Lambert: la décision d'arrêter les soins devant le Conseil d'Etat
Envie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nousEnvie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nous
L'espace des commentaires est ouvert aux inscrits.
Connectez-vous ou créez un compte pour pouvoir commenter cet article.