La rupture des pourparlers intervient six jours avant les élections européennes au pays du Brexit, où les partis travailliste et conservateur vont tenter de parvenir à des scores corrects, alors qu'un sondage YouGov les place respectivement en 3e et 5e position. Les électeurs leur reprochent leurs atermoiements sur le Brexit, initialement prévu le 29 mars mais repoussé au 31 octobre.
Les discussions sont "allées aussi loin que possible" compte tenu de "la faiblesse et de l'instabilité croissantes" du gouvernement conservateur, a écrit le chef du Labour Jeremy Corbyn dans une lettre à Mme May. Pour lui, "l'autorité érodée" de la dirigeante remet en cause sa capacité à "concrétiser tout engagement" pris au cours de ces pourparlers.
Theresa May a elle imputé l'échec des négociations à l'absence de "position commune" parmi les travaillistes. "Ils ne savent pas s'ils souhaitent concrétiser le Brexit ou organiser un second référendum qui pourrait l'empêcher", les a-t-elle blâmés lors d'un déplacement à Bristol (sud-ouest).
Les négociations, entamées début avril à l'initiative du gouvernement, avaient pour objectif de trouver un compromis sur le Brexit, après trois rejets par les députés de l'accord de divorce conclu en novembre entre Theresa May et Bruxelles.
Mais le Labour "continuera de s'y opposer", a assuré Jeremy Corbyn. Malgré des échanges "constructifs", le gouvernement et son parti ont été "incapables de combler d'importants écarts politiques".
Ce sont "six semaines perdues" alors que "l'incertitude paralyse notre économie", a déploré Carolyn Fairbairn, directrice générale de la puissante organisation patronale CBI, appelant à trouver "une solution urgente à ce désordre".
Le Labour est partisan du maintien dans une union douanière européenne - qui instaure une politique douanière et commerciale commune - quand Theresa May a toujours affirmé vouloir en sortir pour permettre à son pays de conclure librement des accords commerciaux avec des pays tiers.
Les travaillistes "n'excluent pas" la tenue d'un second référendum, non pas pour annuler le Brexit mais afin d'"éviter une sortie sans accord", a aussi déclaré leur chef en déplacement vendredi dans le nord de Londres.
"Choix très clair"
A l'issue d'une rencontre mardi avec M. Corbyn, la Première ministre avait annoncé qu'elle se risquerait à un nouveau vote début juin. Les députés devront se prononcer sur un projet de loi sur le Brexit, qui fixera les modalités législatives du divorce, et non sur l'accord lui-même.
Ce tour de passe-passe permet à la Première ministre de remettre à l'ordre du jour par la petite porte son accord de Brexit. "Lorsque les députés voteront, ils seront confrontés à un choix très clair : voter pour concrétiser le Brexit ou se dérober à nouveau", a déclaré vendredi Theresa May.
Qu'ils adoptent ou rejettent ce projet de loi, Theresa May devra se préparer à céder les rênes.
Elle avait déjà promis en mars de démissionner si son accord était adopté, mais sans préciser de date. Jeudi, elle a été sommée au cours d'une réunion avec le "comité 1922", responsable de l'organisation des Tories, de "convenir" dès juin "d'un calendrier pour l'élection d'un nouveau chef du parti conservateur", selon le président du comité Graham Brady.
"Des hommes en gris ont dit à une Theresa May en larmes que son temps était écoulé", résumait vendredi le quotidien conservateur Daily Telegraph.
"En pratique, cela signifie que Theresa May partira d'ici fin juillet au plus tard, pour permettre au parti de choisir un nouveau chef à temps pour la conférence des Tories en septembre", précisait le Daily Mail, prédisant "une course" au pouvoir qui engendrera des divisions énormes avec "plus d'une douzaine de candidats" attendus.
Le défenseur d'un Brexit dur Boris Johnson, ancien maire de Londres et ancien ministre des Affaires étrangères, a déjà confirmé qu'il serait candidat.
"La fin de Theresa May ne veut pas nécessairement dire la fin de son accord sur le Brexit : c'est encore le seul plan auquel l'UE a souscrit et rien n'indique que l'UE voudra renégocier avec un nouveau Premier ministre", a pointé Simon Usherwood, politologue de l'Université de Surrey.
Une série de votes sur la future relation entre l'UE et Londres pourrait aussi être organisée.
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