Le cinéaste de 69 ans, icône flamboyante du cinéma espagnol depuis plus de 30 ans, était venu en 2016 pour la dernière fois à Cannes avec un film pour "Julieta", portrait sombre d'une mère en souffrance, avant de présider le jury l'année suivante.
Ce fidèle du festival entretenait déjà une longue histoire avec la Croisette depuis sa première venue, en 1983, et sa première sélection en 1999 pour "Tout sur ma mère".
Le cinéaste à l'esthétique colorée, reconnaissable entre mille, y est revenu à quatre reprises: pour "Volver" en 2006, "Etreintes brisées" en 2009, "La Piel que habito" en 2011 et "Julieta".
Deux fois récompensé, par le prix de la mise en scène pour "Tout sur ma mère" et le prix du scénario et prix d'interprétation collective pour ses actrices pour "Volver", il n'a cependant jamais reçu le trophée suprême à Cannes, où il n'a plus eu de prix depuis 13 ans.
Cette nouvelle sélection pour "Douleur et gloire" sera-t-elle la bonne? "On peut survivre sans Palme d'or. Je continuerai d'aller à Cannes lorsqu'on m'invitera et, si un jour je l'obtiens, ce sera merveilleux", a déclaré Almodovar dans un entretien diffusé vendredi matin sur France Inter.
En salles depuis deux mois déjà en Espagne, ce 21e film du cinéaste, qui sort en France le même jour que sa présentation à Cannes, est en tout cas précédé d'un accueil critique et public très positif dans son pays.
Huitième collaboration entre Pedro Almodovar et Antonio Banderas - qui a commencé sa carrière au début des années 80 dans "Le labyrinthe des passions", avant de tourner avec l'enfant terrible de la Movida dans "La loi du désir", "Femmes au bord de la crise de nerfs" ou "Attache-moi!" -, ce film émouvant raconte l'histoire d'un réalisateur malade et reclus, Salvador Mallo.
Banderas en double
Arrivé à une période difficile de sa vie, isolé, plongé dans la dépression et diverses souffrances physiques, incapable de continuer à tourner, ce cinéaste qui a connu le succès va revisiter son passé, entre les années 60, les années 80 et le présent, grâce notamment à des retrouvailles.
Impeccable dans ce rôle, Antonio Banderas, qui connaît Almodovar par coeur, joue dans ce film intime un double du cinéaste, adoptant son épaisse chevelure et ses vêtements aux couleurs franches, mais tout en se gardant de l'imiter.
Le réalisateur admet s'être mis à nu émotionnellement dans cette oeuvre, dans laquelle il joue avec brio avec l'autofiction, et qui se déroule d'ailleurs dans son appartement, où les meubles et les tableaux sont les siens.
"J'avais besoin de porter un regard très introspectif, y compris sur la partie la plus sombre de moi-même, et de mélanger ça avec les souvenirs les plus lumineux de mon enfance", a-t-il expliqué à la télévision publique espagnole.
Pour lui, "si on écrit sur un réalisateur (et si on dirige soi-même des films), il est impossible de ne pas penser à soi-même et de ne pas se servir de sa propre expérience comme référence".
"Au début, je me suis pris moi-même comme référence mais, une fois que l'on commence à écrire, la fiction impose ses règles et s'affranchit de l'origine", ajoute-t-il dans les notes de production du film.
Almodovar a d'ailleurs précisé que certains points de sa fiction n'étaient pas autobiographiques, notamment sur des éléments de son enfance, ou sur la drogue que découvre son double - l'héroïne - qui, dit-il, n'a jamais été la sienne, lui qui préférait plutôt la cocaïne.
Le réalisateur prend aussi de nouveau plaisir à filmer sa comédienne fétiche, Penelope Cruz, qui incarne la mère du héros enfant. Grand découvreur d'actrices, Almodovar fait aussi brièvement apparaître à l'écran une chanteuse espagnole qui l'a bluffé, Rosalia.
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