Grève depuis lundi dans des établissements à Bordeaux, Brest ou Beauvais, depuis mardi à Besançon... Au total, d'après la CGT et le collectif Inter-Urgences, une quarantaine de services sont désormais mobilisés.
La moitié se trouve à l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), où le taux de grévistes se maintient autour de 35%, selon la direction.
"Le mouvement s'étend", s'est félicité auprès de l'AFP l'urgentiste et cégétiste Christophe Prudhomme, qui réclame "des négociations nationales sur les effectifs, des primes de 300 euros par mois pour les agents" et davantage de "lits" pour désengorger les services où s'entassent les brancards.
Partie de la base, la mobilisation entamée mi-mars, après une série d'agressions à l'hôpital parisien Saint-Antoine (XIIe arrondissement) s'est propagée le mois dernier aux autres services du CHU francilien, sous l'impulsion de soignants rassemblés derrière la bannière d'Inter-Urgences, relayés par les principaux syndicats de l'AP-HP (CGT, SUD et FO).
La Fédération CGT de la Santé a depuis déposé un préavis de grève national spécifique aux urgences et aux Samu afin de faciliter les mobilisations qu'essaye de fédérer l'Inter-Urgences. Et lundi, le corps médical a apporté son soutien au mouvement, par les voix de l'association des médecins urgentistes de France (Amuf) et du Samu-Urgences de France.
"La situation est extrêmement critique, après la saturation des services, on assiste à la saturation des personnels", a justifié le président de Samu-Urgences de France, François Braun, en rappelant qu'il "tire la sonnette d'alarme depuis 2014".
"Miroir grossissant des dysfonctionnements de l'ensemble du système de santé", selon un rapport du Sénat de 2017, les urgences ont vu leur fréquentation doubler en 20 ans, avec près de 21 millions de passages enregistrés en 2016.
"Un boulot de chien"
"C'est un boulot de chien de travailler aux urgences. On se fait cracher dessus tous les soirs. Des gens meurent" faute de prise en charge rapide, a résumé pour l'AFP l'infirmier Hugo Huon, membre de l'Inter-Urgences en poste à l'hôpital parisien Lariboisière, où le décès inexpliqué d'une patiente en décembre a jeté une lumière crue sur le manque de moyens.
A l'AP-HP, la direction a déjà proposé 61 postes supplémentaires, une prime mensuelle de 65 euros et un versement exceptionnel de 250 euros. Sans pour l'heure parvenir à enrayer la mobilisation, qui a trouvé un écho favorable en régions, poussant des agents à se mettre en grève ou confortant ceux qui l'étaient déjà.
A Beauvais (Oise), "le personnel s'est dit : +là, il faut qu'on bouge", a indiqué le secrétaire FO David Cotu. Malgré des problématiques locales, comme le "manque d'effectifs la nuit, (...) on est tout à fait dans la logique de contagion nécessaire de ce mouvement", a abondé le secrétaire CGT Eric Couq.
A Valence (Drôme), où les soignants mènent depuis fin mars une grève illimitée et chantée, avec une vidéo cumulant plusieurs millions de vues sur les réseaux sociaux, l'Inter-Urgences suscite des espoirs. "Maintenant qu'une flamme est en train de monter, il faut qu'on trouve les moyens d'action pour qu'il y ait un vrai impact", a estimé Virginie Turrel, infirmière, rappelant que les soignants, assignés pour garantir la continuité des soins, "ne peuvent pas vraiment faire grève".
Poursuivant sur sa lancée, le collectif appelle à une rencontre nationale de tous les services en grève le 25 mai à Paris. Il prévoit aussi de "durcir" le mouvement à l'AP-HP à compter de la semaine prochaine, selon Hugo Huon.
Pour la ministre de la Santé Agnès Buzyn, qui s'exprimait mercredi à l'Assemblée nationale lors des questions au gouvernement, "les urgences souffrent aujourd'hui d'une désorganisation" à laquelle répond selon elle son projet de réforme du système de santé, en misant notamment sur la mobilisation des médecins libéraux.
Un objectif louable mais qui "prendra du temps" alors que l'"urgence" est "immédiate", selon l'Amuf.
burs-ac/cel/bma
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